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Les frères McMullen
Analyse

Barry McMullen (Edward Burns) : 7

Barry ne supporte pas la répétition et l’ennui, et c’est surtout vrai dans ses relations avec les femmes :

  Barry : Avec le temps, toutes les relations s’usent. C’est normal.
  Patrick : [Stupéfait.] Le temps a usé votre relation ? Mais, t’étais pas avec elle depuis six mois !
  Barry : Ben, c’est ce que je disais. C’est très long six mois. Tu comprends, y avait plus de mystère. Je sais pas pourquoi. C’est comme ça.

Cela vient d’une incapacité à résister à la frustration : "Quelles que soient ses qualités, il y a pas une femme au monde qui vaille que je renonce au bonheur d’être célibataire. Ailleurs, l’herbe est plus verte." Il n’arrive pas à comprendre que Jack ait pu vivre cinq ans avec Molly : "Comment tu fais pour pas t’ennuyer ?"

Mais la raison principale de sa difficulté à s’engager est le refus des émotions, que Patrick pointe du doigt à la première occasion : "Tu as peur. Tu as peur de tomber amoureux. Tu as toujours eu peur de tes émotions."

Il faut voir la scène où Barry a offert une bague à Audry et lui explique le sens des divers éléments qui la constituent. On admirera la piètre tentative de fuite vers un autre sujet :

  Barry : Le cœur représente une sorte d’amitié… plus profonde.
  Audry : Une amitié ?
  Barry : Oui.
  Audry : Pas de l’amour ?
  Barry : Non. Je veux dire… Oui, c’est vrai. Le cœur c’est souvent le symbole qui désigne l’amour. Mais ras le bol de cette bague. Dis-moi, t’as pu lire mon scénario ou pas encore ?
  Audry : Quand j’aurais pu le lire ? Je l’ai eu il y a deux heures à peine.

En conséquence, Barry ne réussit pas à comprendre que les autres puissent croire à l’amour idéal :

  Patrick : Tu ne crois pas au grand amour ? Tu ne crois pas que Dieu a créé pour chacun une seconde moitié et qu’il n’accorde qu’à quelques veinards de se rencontrer et de connaître l’amour ?
  Barry : Je dois rêver. Comment un débile comme toi peut-il être mon frère ?

Cela amène Barry à rompre souvent, mais évidemment ce n’est pas de sa faute. "Alors dis-nous quel était le problème. Plutôt quel a été son crime car, bien entendu, c’est elle la coupable", lui demande Patrick à propos de sa rupture avec Ann.

Il rêve d’une vie qu’il croit libre : "Je veux pas être amoureux. Je veux pas d’épouse. Je veux pas de famille non plus."

Alors quand Barry comprend qu’avec Audry "c’est devenu sérieux", alors qu’il croyait qu’entre eux "ça se limiterait à boire de coups, à se marrer", il ne sait plus comment gérer la situation :

  Audry : T’as la trouille.
  Barry : Eh oui, ça me fout la trouille, putain. […] J’ai besoin d’un peu de recul pour réfléchir.

Quand il veut rompre, Barry n’est pas très courageux. C’est ainsi qu’il conseille à Patrick de rompre avec Susan sur son lieu de travail : "Ça t’évite les scènes de ménage et aussi de devoir raccompagner en voiture toutes ces dames à qui tu viens de briser le cœur."

Barry n’a pas peur des émotions qu’avec les femmes. Il ne s’intéresse pas réellement aux problèmes de Patrick : "Si tu savais ce que j’en ai rien à cirer de tes peines de cœur et de ton amour idéal." Quand ce dernier quitte New York pour la Californie, Jack et lui s’étreignent, puis Patrick se tourne vers Barry :

  Barry : Pour moi une poignée de main suffira, Dugenou.
  Patrick : Pas pour moi.
  Barry : [Patrick le serre longuement dans ses bras.] Oh, ça va, ça suffit.

Barry a un sens de l’humour particulièrement acide :

  Barry : À propos de notre alcoolo favori qui n’a pas cessé de battre sa femme et d’engueuler ses gosses, j’ai fait un tour au cimetière ce matin.
  Jack : Et ?
  Barry : Et… Je vous confirme avec plaisir qu’il est toujours mort.

Il affiche volontiers une façade de cynisme :

  Patrick : Elle me manque.
  Barry : Ce blues, on l’appelle "Vais-je encore tirer un coup avant de mourir ?".

Cela lui permet, pour son plus grand plaisir de choquer ses frères :

  Patrick : Tu renonces à quoi pour le carême ?
  Barry : Je renonce à mes bonnes résolutions.
  Patrick : [Choqué.] Très pratique.

Mais il y a une chose que Barry respecte, c’est le plaisir de manger. Quand il va au restaurant avec Marty, son éditeur, les consignes sont strictes : "Et voilà. J’ai rempli ma part du contrat. J’ai pas parlé boulot à table", déclare Marty à la sortie.

Barry est fondamentalement optimiste. Quand l’appartement rêvé de Greenwich Village lui passe sous le nez, il espère pendant des jours qu’Audry qui l’a loué aura des remords : "Je croyais qu’elle regretterait et que pour se faire pardonner, elle me proposerait de partager l’appart avec elle." Et quand il n’est pas optimiste, c’est uniquement pour éviter la souffrance : "Ça me plaît d’être pessimiste. Ça m’aide à assumer mes échecs inévitables."

Barry pratique avec enthousiasme la rationalisation, mécanisme de défense du 7 :

  Barry : Vous vous rendez compte. [John F. Kennedy] était président des États-Unis. Imaginez le stress, la pression. C’est pas évident de tenir le coup. Et puis il a eu une histoire avec Marilyn Monroe. Je dis que c’est le signe de, oui, d’une grande force de caractère car il a saisi une opportunité unique.
  Molly : Tu es malade, Barry.
  Patrick : [Ironique.] Non, au contraire, lui, il sait penser.

Barry a une théorie sur tout et, en bon 7, aime parler par métaphore comme dans cette inénarrable présentation des rapports entre hommes et femmes : "Écoute les conseils d’un grand frère plus sage et bien plus expérimenté. Voilà, j’ai une théorie. L’homme, tu vois, c’est comme une banane. Solide et ferme, glorieuse et phallique et recouverte d’une protection dont dépendent des tas de choses. Mais quand la femme se pointe et qu’elle voit cette bête phallique magnifique, elle la veut. Mais en réalité, elle ne l’aime pas comme elle est, et elle veut voir ce qu’il y a là-dedans. Alors, n’écoutant qu’elle-même, elle enlève cette insolente protection. D’abord elle veut voir le côté romantique en toi, ensuite elle veut voir le côté passionné en toi, et ensuite ton côté tendre, attentionné, féminin. Elle continue de peler, de peler jusqu’à ce que tu te retrouves nu. T’as plus rien. Tu avances sous la pluie avec les valseuses qui claquent au vent. Et c’est là qu’elle prend le couteau et elle se met à couper dans ta virilité tranche après tranche jusqu’à ce que ta bite finisse dans leurs corn-flakes."

Identification avancée : Barry est un 7 α de sous-type sexuel ("Imagination").

Patrick McMullen (Mike McGlone) : 6

Patrick voit toute sa vie à travers trois filtres : la peur, Dieu, et la peur de Dieu !

Pour Patrick, la peur est une chose habituelle et évidente dans sa vie :

  Leslie : Tu as eu la trouille ? C’est ça ?
  Patrick : Non ! J’ai pas eu la trouille du tout. Oui, bon j’ai eu la trouille. Ça, c’est normal.

En fait, 6 plutôt phobique, il avoue sa peur assez facilement : "Elle a rompu avant moi. Du coup, je me demande si je veux pas tous ces trucs dont je croyais avoir peur." Il la confie même à Barry qui risque pourtant de se moquer de lui :

  Barry : Mais pour ce qui concerne Susan, c’est clair qu’elle doit dégager.
  Patrick : Oui. Oui, c’est ce que je me disais aussi. Mais, tu comprends, j’ai peur, Barry.

Son anxiété prend des formes cocasses dans ses relations sexuelles avec Susan :

  Patrick : Je crois qu’il a explosé !
  Susan : Je comprends pas pourquoi tu t’inquiètes. Je prends la pilule.
  Patrick : Hé ! On n’est jamais trop prudent. Et n’oublie pas que je suis catholique, je ne devrais même pas être en train de faire ça.

On comprend qu’il soit amer quand il apprend que Susan est enceinte : "Avec toutes ces précautions ! Je mettais deux capotes au lieu d’une."

La peur de Patrick n’a pas réellement d’objet :

  Patrick : [Il est en train de faire l’amour avec Leslie.] Jésus, Marie, Joseph !
  Leslie : Qu’est-ce qui va pas ?
  Patrick : J’en sais rien.

Au sein de cette peur, son appartenance à l’Église catholique crée une sorte de sécurité. Patrick en est fier : "Je vais à l’église chaque dimanche." Il en apprécie les règles : "La répression a aussi de très bons côtés, je te le dis." Il pousse les autres à les appliquer : "Tu renonces à quoi pour le carême ?" ou "Ce sont des épreuves que Dieu te lance, Barry, et tu le déçois." Quand ils les transgressent, la peur réapparaît aussitôt :

  Patrick : Sur un plan éthique, moralement, je ne peux pas. Je ne saurais vivre avec une femme sans le sacrement du mariage. Alors, je veux dire… Il faudrait qu’on soit mariés. Alors là, ça ne poserait plus de problème. […] Je vivrais dans le péché.
  Susan : Mais on vivrait pas dans le péché parce qu’on s’aime tous les deux.
  Patrick : Comment ? Qu’est-ce que t’as dit ? Comment ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Nul ne déroge au commandement de Dieu. C’est un péché, et les sentiments n’y peuvent rien. Ça, c’est la loi. […] Tu comprends que je suis catholique, c’est ma vérité. Il y a des lois et des règles qui existent. On doit s’y plier. Par respect pour soi-même.

Mais en même temps, sa foi entretient sa peur puisque la déviance, objet de la compulsion du 6, le menace sans cesse. Patrick se voit donc en permanence menacé par la damnation : "Je vais aller en enfer.", "Ma vie est foutue. Je vais aller en enfer." ou

  Patrick : Moi, je vais aller en enfer.
  Jack : Pourquoi cette fois-ci plus qu’une autre ? Raconte, l’enfant de chœur.

Une autre source de sécurité pour Patrick vient de l’appartenance à un groupe, le cocon universitaire ("J’étais bien au campus dans la chambre, je dois la rendre et j’ai l’impression de tomber du nid.") ou le cocon familial ("Le fait de vivre sous le même toit, ça m’a fait du bien. ça faisait famille."). Aussi est-il très choqué et peiné quand Jack doute de sa loyauté :

  Jack : Pas un mot à Molly. Et à Barry non plus. T’as compris ?
  Patrick : Mais… Comment tu peux penser que je pourrais faire ça ?

Patrick est en permanence dans le doute. Il s’interroge sur lui-même, sur ses paroles et sur ses choix : "Est-ce que j’aurais sorti cette histoire de péché pour ne pas m’installer avec elle ?" Il cherche aussi la signification des propos des autres : "Qu’est-ce que ça veut dire ‘faire de nouvelles rencontres’ ? Elle doit coucher avec d’autres types. C’est ça ! Et oui, c’est ça que ça veut dire ! Mais c’est parfait. C’est absolument parfait. C’est monstrueux."

Ce doute le pousse à demander sans cesse l’avis des autres : "Qu’est-ce que je fais dans la vie ?" Il interroge notamment Barry dont il admire l’audace et la créativité : "Oui, ça, fallait le trouver !"

Patrick est conventionnel. Il n’aime guère le changement : "J’ai aucune envie d’évoluer. Je suis déjà bien assez perturbé." Il est facilement choqué, notamment par l’attitude de Barry et par son humour :

  Barry : À propos de notre alcoolo favori qui n’a pas cessé de battre sa femme et d’engueuler ses gosses, j’ai fait un tour au cimetière ce matin.
  Jack : Et ?
  Barry : Et… Je vous confirme avec plaisir qu’il est toujours mort.
  Patrick : [Choqué.] C’est… C’est à crever de rire, Barry. C’est un numéro fabuleux.

Identification avancée : Patrick est un 6 α à aile 7.

Ann (Elizabeth P. McKay) : 8

Ann manifeste toute la puissance du 8. Elle séduit Jack à la hussarde, mais elle prend bien soin dès le début de se protéger contre toute implication de sa part. Elle dit ne pas être "la femme d’un seul homme" et préférer une relation avec un homme marié : "On ne se poserait plus de questions inutiles. On essaierait de tirer le meilleur parti de notre relation. On saurait que c’est sans lendemain."

Elle précise :

  Ann : Tu te trompes. Ce n’est pas ton amour qui m’intéresse. Je te veux toi.
  Jack : Ann !

Ayant ainsi fixé les règles, elle peut se livrer à la passion du type, l’excès, plus traditionnellement appelée la luxure :

  Jack : Il n’y pas une minute qui passe sans que j’aie envie de faire l’amour avec toi.
  Ann : Attention, l’entraîneur ! Rappelle-toi, c’est pas de l’amour qu’on fait tous les deux.
  Jack : C’est une façon de parler.
  Ann : Oui. Et bien j’aimerais mieux que tu me dises juste que tu as envie qu’on baise.

Elle se moque de la fébrilité de Jack lors de leur première rencontre : "Ne sois pas si nerveux. Courage ! Même sans anesthésie ça passe. J’te promets."

Il n’est pas question que Jack l’ennuie avec sa culpabilité. La réaction est immédiate et brutale : "Tu serais gentil de nous épargner les sermons, Jack. Au cas où tu serais pas au courant, c’est toi qui demandes à nous voir ces temps-ci. Alors ne me le reproche pas. […] Oui d’accord tu as une aventure. Viens pas nous faire un cirque. […] Regarde les choses en face, Jack. Si tu l’aimais tant ta Molly, tu serais pas en train de courir et de me demander de faire l’amour dès qu’elle a le dos tourné. OK, écoute moi. Je n’ai pas envie de m’enfoncer dans ce délire. Ne te fatigue pas à monter et appelle quand tu auras renoncé à ce délire."

Identification avancée : Ann est un 8 α à aile 7 de sous-type sexuel ("Possessivité").

Autres

D’autres personnages peuvent être étudiés à l’aide de l’Ennéagramme :

Molly McMullen (jouée par Connie Britton) est un 1. Elle a des valeurs strictes ("Je n’ai aucun respect pour quelqu’un qui trompe sa femme. Point final.") et vit selon des règles tout aussi catégoriques ("C’est ta famille Jack et on ne dit jamais non à la famille. Si ça les aide, c’est parfait."). Sa conception de la vie en couple est, elle aussi, très caractéristique : "Il faut tenir bon, regarder tout ce qu’on a construit dans nos vies et tâcher de se rappeler ce qu’était cet espoir qui nous avait animés." Forte, elle supporte mal les tergiversations de Jack : "C’est quoi cette lâcheté de merde. Tu me fais honte." Elle affronte directement la vie : "C’est certainement pas par la fuite qu’on pourra résoudre nos problèmes."

Jack McMullen (joué par Jack Mulcahy), très amoureux de sa femme, déchiré entre le désir et la culpabilité, considéré par ses frères comme "une sorte de vieux facho réactionnaire, de prof de morale atroce" est probablement un 9 à grosse aile 1, même si l’hypothèse inverse peut très bien être soutenue.

Audry (jouée par Maxine Bahns) est 7. Elle a beaucoup d’humour ("Qui vous a dit que la vie était correcte ?"). Elle est assez agressive avec Barry : "C’est vrai qu’on s’est déjà vu quelque part. Vous êtes l’abruti qui voulait louer mon appartement." Elle a peur de l’engagement, se protège par le mensonge ("mariée", "fiancée") et ne tient pas à épouser Barry. Même si elle l’aime, elle n’est guère disposée à la souffrance que serait le fait de l’attendre : "Barry, je suis prête à t’attendre un peu, mais pas toute ma vie." Et plus tard : "Je passerais pas trente-cinq ans de ma vie à t’attendre." Elle veut profiter de la vie : "Ce serait idiot de rater des occasions de se marrer."

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