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Trois analyses à l'aide de l'Ennéagramme
Teresa Malcom (Traduction par Murielle Gardret & Fabien Chabreuil)

Lawrence d'Arabie

Lorsque j'ai vu pour la première fois Lawrence d'Arabie, le film de David Lean, je me suis fortement identifiée au film et au personnage de Lawrence. Je voulais vivre et ressentir profondément ce qu'il avait vécu, sans me soucier des risques sur ma santé physique ou mentale. Le film m'a convaincu que le bon moyen de vivre cela était de vivre et de s'immerger dans une culture étrangère.

Le film influença donc ma décision de rejoindre le Peace Corps [Note du traducteur : le Peace Corps est une association de volontaire soutenue par le gouvernement des États-Unis et destinée à favoriser l'amélioration de l'éducation et de la santé ainsi que le développement de l'agriculture et de l'industrie dans le monde entier]. Et pour cela, j'en suis reconnaissant même si les deux années passées en Thaïlande m'ont montré que la vie à l'étranger peut, à sa façon, être aussi ordinaire que la vie chez soi.

Regardant avec recul le film au travers le prisme de l'Ennéagramme, j'y vois un hymne au type 4, tel que celui-ci est exprimé par le personnage de Lawrence interprété par Peter O'Tolle. Dès la première scène, le spectateur découvre que Lawrence n'est pas comme ses soldats servant au quartier général anglais au Caire lors de la Première Guerre mondiale. Il est bien éduqué, en fait étalage, et est clairement insatisfait des devoirs mondains qu'implique sa fonction. Il est mal à l'aise dans son uniforme militaire, et en est conscient.

Dans la scène d'ouverture, nous le voyons tourner, de façon théâtrale, une allumette entre ses doigts pour éteindre la flamme. Un de ses soldats essaie de faire de même. Il glapit et jette l'allumette quand il se brûle les doigts. "Bon sang, cela brûle !" s'exclame-t-il.

"Certainement, cela brûle", dit Lawrence.

"Bien, quelle est l'astuce alors ?", dit le soldat.

Lawrence répond : "Le truc est de ne pas penser que cela brûle."

Cet échange est symbolique de son désir de mener une vie riche en expériences, même, et peut-être surtout, dans ses aspects douloureux. Lorsqu'il est envoyé en mission par l'armée britannique pour prêter assistance aux Arabes en révolte contre les Turcs, il se jette de façon masochiste dans la vie du désert, déterminé à devenir comme les Bédouins des tribus qu'il combat, et non simplement un Anglais ordinaire. Il revêt un habit arabe, la tenue blanche des sharifs, et la transformation est complète : il n'est peut-être pas un Arabe, mais il n'est déjà plus un Anglais.

La souffrance liée à la période de guerre l'ébranle peu à peu. Après qu'il soit emprisonné et torturé par les Turcs à Deraa, il renonce au rôle spécial qu'il a conçu pour lui-même. Il quitte les Arabes et retourne au Caire pour implorer "un job ordinaire, qu'un homme ordinaire peut faire". Son commandant, le Général Allenby, refuse et le convainc de retourner dans le désert. À la fin de la guerre, Lawrence est un homme brisé, désillusionné, apparemment épuisé par la vie.

Une de mes amies, de type 9, voulait voir ce film qui signifiait tant pour moi. Après sa vision, elle sembla un peu perplexe. "Je ne suis pas certaine de savoir pourquoi tu veux devenir comme lui.", me dit-elle. "C'est une espèce de timbré."

Je lui dis que ce que je ressentais, une explication inadaptée autour des thèmes du carpe diem. Mais la vérité était que moi, en tant que 4 de sous-type social vivant sa vie tranquille dans le Missouri, j'étais indirectement excité par le film, par les élans d'auto-conservation d'un type 4 engagé dans une lutte entre la vie et la mort. Lawrence dit ne pas être ordinaire, et il le prouve.

Cela lui sert bien au départ en tant que leader de la révolte arabe : il est héroïque et c'est un stratège intrépide. Mais plus tôt déjà, il avait fait preuve d'une négligence irréfléchie pour sa sécurité personnelle. Lorsqu'il avait reçu une balle dans l'épaule, il avait dit : "Je ne suis pas du tout blessé. Ne le saviez-vous pas ? Seule une balle en argent peut me tuer." Il disait cela avec un sourire sur le visage, mais la croyance sous-jacente est très forte. En définitive, il dégénère et glisse vers une imprudence extrême, mettant en danger sa vie et celle des personnes sous ses ordres.

Bien que son attachement aux Arabes dont il a épousé la cause soit intense, le film met en doute de façon explicite la force de ses principes, quand le chef arabe, le prince Feisal (Alec Guiness), dit à un reporter : "Avec le Major Lawrence, la pitié est une passion. Avec moi, c'est simplement de bonnes manières. Vous pouvez juger quel motif est le plus digne de confiance." La vérité sortira plus tard de ce commentaire, lorsque Lawrence conduit son armée au massacre des troupes turques comme vengeance de l'attaque d'un village arabe par les Turcs.

Bien sûr, personne ne peut attendre d'Hollywood de dépeindre fidèlement l'histoire et Lawrence d'Arabie n'est pas une exception. Le vrai T.E. Lawrence était de type 4, et il est intéressant de noter les différences entre lui et son interprète à l'écran.

Dans ses jeunes années, il montra certes les signes d'audace d'un 4 de sous-type conservation, se livrant à des tests physiques d'endurance, pratiquant le cyclisme dans toute la France. Malgré sa petite taille (adulte, il mesurait seulement 1m65), il arrivait à rabaisser le caquet des petits caïds de l'école. Ce comportement intrépide s'est certainement étendu à ses expériences pendant la durée de la guerre. Comme dans le film, il s'ennuyait, était agité et quelques fois indiscipliné alors qu'il travaillait dans un bureau au Caire. Mêlé à cela, il y avait un sentiment de culpabilité : pendant qu'il travaillait en sécurité dans un bureau, deux de ses frères étaient tués sur le front européen.

Ainsi, il était avide de changement lorsque la chance lui sourit en lui donnant l'occasion de coordonner la révolte arabe avec les troupes britanniques et ainsi de passer la durée de la guerre sur le terrain, dans le désert parmi les Arabes. Cependant, si vous lisez ses écrits, il fait souvent une distinction entre sa vraie nature, introspective et intellectuelle, et le rôle qu'il sentait qu'il était en train de jouer. "De même que ma guerre était exagérément réfléchie car je n'étais pas un soldat, mes efforts étaient exagérés parce que je n'étais pas un homme d'action", écrit-il dans ses mémoires, Les Sept Piliers de la sagesse. "C'étaient des efforts intenses et conscients dont j'observais les résultats avec détachement et autocritique."

Ces années étaient physiquement et émotionnellement fatigantes. Sa conscience le tourmentait lorsqu'il faisait des promesses aux Arabes alors qu'il soupçonnait que son gouvernement ne les tiendrait pas. L'expérience en tant que prisonnier des Turcs, lorsqu'il a été torturé et violé, lui a infligé de profonds dommages psychologiques. Une lettre personnelle rédigée à un ami en 1918 est telle un cri d'angoisse. Pourtant, il enroba la lettre d'un commentaire sur ses plaintes empreint d'une ironie désabusée : "C'est une lettre idiote qui ne représente pas grand-chose à l'exception d'un cri pour obtenir un futur changement ; ce qui est idiot puisque je change de lieu de résidence tous les jours, de travail tous les deux jours et de langue tous les 3 jours et que je reste encore et toujours insatisfait. Je déteste être au front et déteste être de retour. Je n'aime pas les responsabilités et n'obéis pas aux ordres."

Il n'est pas difficile de reconnaître dans cette auto-observation l'insatisfaction du type 4 concernant tout ce qu'il a à portée de la main, et sa nostalgie pour tout ce qui n'est pas là, insatisfaction et nostalgie pourtant justifiées dans ce cas. On retrouve ces émotions de façon plus dramatique dans le dernier paragraphe des Sept Piliers de la sagesse, des mots qui ont toujours fait résonance en moi : "J'ai fait à Allenby la dernière (et je pense aussi la première) demande pour moi-même, partir pour aller ailleurs. […] À la fin, il était d'accord et d'un coup, je sus combien j'en étais désolé." Je n'aurais pas pu mieux le dire le jour où je quittai la Thaïlande.

Alors que sa renommée grandissait, Lawrence passe les premières années de l'après-guerre à faire campagne, avec peu de succès, pour l'indépendance des Arabes qu'il avait promis durant la guerre à ses compagnons d'armes. Comme la diplomatie échouait et alors qu'il travaillait aux Sept Piliers de la sagesse, il commença à sombrer dans une profonde dépression. C'était comme si finalement, de retour en Angleterre, le plein impact de ses atroces expériences remontait à la surface.

Pendant cette période (du début des années 1920 jusqu'en 1925 environ), un mot principal se retrouve sans cesse dans sa correspondance : la honte. Honte particulièrement à propos de son rôle dans le mensonge fait aux Arabes, et honte de sa sexualité. C'est un thème si récurrent qu'il devient clair que le réel Lawrence était un 4 de sous-type social que les expériences dévastatrices conduisirent à se mépriser et à chercher des moyens de se punir de ses fautes.

"Sais-tu ce que c'est que de voir tout à coup que ta vie tout entière est une ruine ?", écrit-il à son amie Charlotte Shaw (l'épouse de George Bernard Shaw). "Mes raisons me disent à chaque instant, jour et nuit, la façon dont j'ai raté ma vie et dont j'avais désespérément tort : et c'est sans espoir puisque je ne reviendrai jamais et pourtant je le veux."

Il ne voulut pas gagner d'argent avec son livre, refusant de tirer profit du sang des autres et de ce qu'il considérait être sa monumentale trahison des Arabes. Même s'il a envoyé son livre à des écrivains respectés afin d'obtenir leurs commentaires et leurs corrections, il se lamentait ad nauseum de son peu de valeur dans les lettres qui accompagnaient l'ouvrage. "C'est tellement verbeux, prétentieux et stupide que je ne supporte plus de me regarder", écrivit-il à Bernard Shaw.

Certaines personnes ont considéré les dépréciations sans fin de Lawrence concernant son propre travail comme une façon de rechercher des compliments, mais le romancier E.M. Forster était plus charitable : "[Il] avait envers le travail [des autres écrivains] une attitude très rare et très noble, laquelle peut être mieux décrite comme une jalousie divine. Certains auteurs se fichent d'être surpassés, d'autres en deviennent maussades ; T.E. sentit à la fois de la peine et de la joie, parce que son dégoût de sa propre infériorité supposée était inséparable de son plaisir à voir les accomplissements des autres."

Cela le consterna de devenir célèbre en tant que Lawrence d'Arabie. La partie de sa vie qu'il considérait comme la plus honteuse était en train de s'imposer par elle-même dans la vie publique. C'est en partie pour échapper à la notoriété qu'il changea de nom à double reprise, et s'engagea dans les rangs les plus bas de l'armée et ensuite de l'aviation. Cependant, il décrit son choix comme un désir de se dégrader lui-même : "Je désire que les gens me regardent de haut et me méprisent", écrit-il à Charlotte Shaw. "Je veux me salir extérieurement pour que ma personne puisse refléter correctement la saleté qu'elle cache."

Jeremy Wilson, le biographe de Lawrence, fait une remarque pertinente à propos de son "besoin de descendre" : "Si [Lawrence] avait réfléchi, il aurait réalisé que son éducation et son expérience lui vaudraient toujours une place spéciale parmi les hommes du rang. En pratique, effectivement, son 'inclinaison vers la base' le mit dans des situations où sa supériorité intellectuelle était sans rivale et s'exprimait sans effort. Ses lettres de cette période montrent clairement qu'il n'a fait aucun effort pour échapper à ce statut spécial ; bien au contraire, il le cultivait. Ces comportements suggèrent que Lawrence souffrait d'un grave sentiment d'insécurité."

De fait, il admit plusieurs fois qu'il lui était difficile de vivre en compagnie de ces hommes. "Une soudaine impatience me submerge parfois quand l'ordinaire de ces hommes ordinaires devient insupportable", écrit-il à un ami. Mais il s'en voulait quand cette impatience devenait manifeste et était inquiet de ce que les autres pouvaient penser de lui : "Étant excessivement sensible, je plonge pendant des jours dans la détresse pour une faute si légère qu'elle ne me vaudrait pas un reproche de qui que ce soit."

Il s'inquiétait aussi à l'idée que les hommes du rang puissent voir en lui un "novice" et il ne savait pas comment se comporter avec eux. "C'est pour cela que je ne peux pas les accompagner aux bordels de Lincoln ou de Navenby", disait-il. "Ils croient que c'est parce que je me sens supérieur, fier ou différent, snob comme ils disent. Mais c'est seulement parce que je ne saurais pas comment m'y comporter, comment me tenir et jusqu'où aller."

En fait, il est très probable qu'il ne serait jamais allé au bordel. À cette période de sa vie, il éprouvait de la répulsion pour le corps et en particulier pour la sexualité. Cela peut trouver quelques racines dans son histoire familiale : lorsqu'il était jeune, il découvrit qu'il était un enfant illégitime. Ses parents, de classe moyenne, n'ont jamais su que leur fils savait la vérité. Il emporta son secret avec lui, ce qui était dévastateur pour un enfant élevé strictement selon la religion et les valeurs victoriennes. C'était l'une des raisons pour lesquelles il changea de nom. Selon lui, Lawrence, le nom que ses parents avaient choisi, n'était pas plus valide que Shaw, le nom qu'il adopta.

Quel que soit l'effet que cela ait eu sur sa sexualité, son expérience lorsqu'il était aux mains des Turcs a rendu tout ce qui était physique odieux à ses yeux. Disparu le Lawrence qui aimait à pédaler au travers les montagnes françaises ; maintenant il ressentait de la honte s'il prenait du plaisir à faire de la motocyclette. Quant au viol lui-même, il le considérait comme la perte de son intégrité. "Cela me collera à la peau tant que je vivrai, et encore après si notre personnalité survit", dit-il à Charlotte Shaw. "Je m'imagine me promenant parmi les fantômes décents et criant : Sale ! Sale !"

Lawrence dit à son ami E.M. Forster : "Je porte curieusement un masque en termes de sexualité." La sexualité de Lawrence a fait couler beaucoup d'encre. Le film considère qu'il était homosexuel et masochiste (ce n'est que vaguement sous-entendu — cela était fait en 1963). Si on lit la correspondance de Lawrence à la lettre, il semble qu'il était asexué, ne portant d'intérêt ni aux hommes, ni aux femmes après l'expérience de Deraa.

Le masochisme qui lui est attribué pourrait être davantage fondé : il est évident qu'à plusieurs reprises au cours des années 1920, Lawrence s'est arrangé pour être flagellé. Son frère, A.W. Lawrence, dit qu'il fit cela dans la tradition des ascètes médiévaux. John E. Mack, professeur de psychiatrie, conclut dans son livre intitulé A Prince of Our Disorder que la flagellation était une façon pour Lawrence de se punir de son viol. Mais Mack laissa le débat ouvert, considérant le sujet trop complexe pour avoir une réponse simple : "En chacun de nous, et très certainement en Lawrence, quelques caractéristiques doivent exister par elles-mêmes sans autre explication."

La dépression dans laquelle il plongea, au moins partiellement pour le restant de sa vie, avait pris racine dans sa honte et dans sa conviction, en tant que 4 de sous-type social, d'être un imposteur : imposteur en tant que soldat, écrivain, diplomate et célébrité. Finalement, c'était l'instinct de conservation du 4 qui le tua : sa longue réputation de cycliste rapide et intrépide prit fin lors d'un accident fatal en 1935.

La 4-itude du mythe du vampire

Parfois une œuvre de fiction peut tellement ressembler aux caractéristiques spécifiques d'un ennéatype que vous pouvez vous demander à propos de son créateur : joue-t-il sa vie intérieure dans cet univers imaginaire ?

Telle est ma réflexion au sujet de l'univers dépeint dans la série télévisée Buffy contre les vampires et son dérivé Angel. Sous la conduite de leur créateur Joss Whedon, Buffy et Angel baignent dans le type 4 tant en ce qui concerne les personnalités et les conflits des protagonistes éponymes que les thèmes récurrents de l'histoire.

Dans une interview Joss Whedon décrivit sa fascination pour les vampires qui le conduisit à la création de Buffy : "J'ai toujours été attiré par les vampires en raison de l'isolement qu'ils ressentent. Ils sont dans le monde mais n'en font pas partie. Lorsque j'étais enfant, je ressentais la même chose et Buffy traite de ce genre d'aliénation." Sa vision fait écho à la 4-itude du mythe du vampire.

Buffy, la tueuse de vampire, la fille possédant la puissance pour défendre l'humanité contre les vampires et les autres démons, trouve son origine dans une pièce de théâtre que Joss écrivit et qui fut adaptée au cinéma en 1992. Mais Joss fut déçu par le résultat hollywoodien. Il dit qu'il pleura lors de la première vision tellement il était déçu. Cinq années plus tard, la chance lui était donnée de l'adapter correctement grâce à l'émission télévisée. Meilleure continuation du concept originel que le film, la série est drôle, intelligente, perspicace et en même temps émouvante, s'enrichissant de saison en saison.

Elle utilise aussi bien la fantaisie que l'horreur pour donner une réalité littéraire au domaine de l'émotionnel. Pour les étudiants en Ennéagramme, ces métaphores peuvent aussi procurer un aperçu des motivations derrière chacun des profils. Et dans le monde de Joss Whedon, celui qui est sondé au plus profond est le type 4.

Avec les éléments surnaturels, le sens de la différence qui caractérise le 4 prend forme d'une manière qui rend le 4 littéralement unique. Dans le cas de Buffy, c'est son statut en tant que tueuse de vampires, "celle qui a été choisie". C'est la mission de Buffy, un devoir sacré — et un fardeau — qui la met à part, qu'elle portera jusqu'à sa mort, où un autre tueur de vampires sera appelé.

Buffy exprime fréquemment son désir de mener la vie "normale" qu'elle ne peut avoir, mettant ainsi en évidence l'habitude du 4 de parler en termes de lamentation. Mais lorsque son statut spécial est menacé, cela secoue son sens de l'identité. Par exemple, dans l'épisode intitulé Impuissante, elle semble avoir perdu ses pouvoirs et elle demande à Angel, l'amour de sa vie : "Si je ne suis plus la tueuse, que puis-je faire ? Qu'est-ce que j'ai à offrir ? Pourquoi me voudrais-tu ?"

Sa prise de distance par rapport à la vie ordinaire est de plus en plus importante au fur et à mesure que les années passent. Le mélange torturé de sentiments d'infériorité et de supériorité que vit le 4 se manifeste de façon stupéfiante dans la septième saison lorsque Buffy avoue : "Je sens que je suis pire que n'importe qui. Honnêtement, je suis en dessous. Je sens que je ne suis pas digne de l'amour de mes amis et de mon petit ami. Même s'ils m'aiment, cela ne veut pas dire grand-chose puisque leur opinion n'importe pas. Ils ne savent pas. Ils ne savent pas par quoi je suis passé. Ils ne sont pas la tueuse. Je le suis. Parfois, je sens — et c'est affreux — que je suis meilleure qu'eux. Supérieure."

La saison précédente avait développé chez Buffy un autre aspect du 4 : la préoccupation d'un paradis perdu, une période où étaient présents le bonheur et l'amour devenus aujourd'hui inatteignables. Une fois de plus, le côté surnaturel de l'émission fait de cette idée une réalité. À la fin de la saison 5, Buffy meurt dans un acte héroïque d'auto-sacrifice. Trois mois plus tard, ses amis utilisent la magie pour la ressusciter en pensant qu'ils étaient en train de la sauver d'une dimension démoniaque.

Mais en réalité, nous découvrons que Buffy était au Paradis et non en Enfer. Elle était satisfaite et "finie" et est arrachée de ce paradis par des gens qui l'aiment pour aller vers un monde dur et douloureux. Buffy lutte avec cette perte tout au long de la sixième saison, abandonnant ses amis et glissant dans une profonde dépression. Elle est uniquement capable de ressentir des sensations en ayant des relations sexuelles secrètes avec Spike, un vampire. (Buffy est de sous-type conservation, qui affronte le danger pour assouvir sa soif d'émotions intenses.)

La relation intime la plus représentative de Buffy est celle qu'elle a eue avec un autre vampire : Angel, lequel faisait partie du casting durant les trois premières saisons. Angel était également un 4, et ce qui le rend bon est également ce qui le rend unique. Quelque 140 ans plus tard, Angel devint un vampire. Une malédiction bohémienne rétablit son âme humaine, et par conséquent sa conscience. Depuis ce temps, il souffre de la connaissance du mal qu'il a fait. Ni tout à fait humain, ni tout à fait vampire, il est étranger à ces deux mondes.

Alors, il rencontra Buffy. Sa relation avec elle changea sa vie, prenant les traits du 4 qui s'intègre : après des décennies de complaisance dans la misère de son existence, il apprit à faire le bien et à faire amende honorable en combattant les forces du mal.

Ce n'est pas un chemin facile. La malédiction bohémienne a une suite : si Angel vit un moment de pur bonheur, il perdra son âme. C'est un parfait parallèle avec l'attachement du 4 à la souffrance, élément qui le rend différent. Si la souffrance d'Angel disparaît, il perdra la partie de lui-même qui le rend spécial et deviendra un tueur sans âme.

De fait, cela se produit lorsque Angel et Buffy font l'amour pour la première (et dernière) fois. Angel redevint mauvais. Finalement, il sera envoûté à nouveau et son âme reviendra. L'amour de Buffy et d'Angel s'en trouvera encore plus tourmenté et condamné qu'au début. Les 4 sont attirés de façon chronique par ce qui est indisponible, par la personne complètement incorrecte — et qu'est-ce qui pourrait être plus incorrect qu'un vampire et qu'une tueuse de vampires amoureux l'un de l'autre ? ("Je cible les personnes impossibles avec une précision morbide", dit Buffy).

Après 3 ans, Angel fit face au désespoir de la situation et quitta Buffy. Il quitta aussi Buffy, l'émission, pour sa propre série portant son nom et dans laquelle il continua de combattre la bonne cause avec une nouvelle bande d'amis qui lui accordaient leur aide. Angel, l'émission, a la charmante habitude de choisir ses héros de type 4 et de s'en moquer juste un peu. Cordelia, la collaboratrice d'Angel, prend un visage sérieux pour l'imiter : "Allô, c'est Angel. Oh non, je ne peux rien faire d'amusant ce soir. Je dois compter mes péchés passés et les classer par ordre alphabétique. Oh, à propos, je songe à me détruire vendredi."

Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas encore sentir sa souffrance. Dans une histoire de cœur déchirante, le visage d'Angel perd son aspect humain sous l'effet de forces surnaturelles, et devient complètement démoniaque, hideux et vicieux. Ses amis le voient ainsi. Lorsqu'il reprend son apparence normale, il s'effondre tout tremblant et dit d'une voix entrecoupée : "Ils l'ont vu, ils m'ont regardé. Le monstre ! Ils ont vu ce que je suis vraiment. Je ne peux pas revenir. Pas maintenant. Je ne pourrai jamais revenir." Pour Angel, le démon représente la défectuosité que le 4 croit avoir et dont il pense qu'elle le rend indigne d'être aimé.

Lorsqu'il est au plus mal, il ne peut accepter l'amour de ses amis, ni croire que ses actions peuvent faire une différence. "Qu'importe combien j'essaie, dit-il, tout ce que je touche devient cendres."

Finalement, il se reprend et poursuit sa tâche, établissant un lien positif avec le 1 qui se traduit par de l'idéalisme. Il explique le but de sa vie en ses termes : "Rien au monde n'existe de la façon appropriée. C'est dur et cruel. Mais c'est pourquoi nous sommes là. Champions. Cela n'importe pas d'où nous venons, ce que nous avons fait ou souffert, ou même si nous faisons une différence. Nous vivons comme si le monde était ce qu'il devrait être pour montrer ce qu'il peut être."

Joss Whedon dit que les démons, les monstres et les combats surnaturels sont des moyens de transmettre des émotions de la vie réelle. Une pensée métaphorique comme celle-ci est un don du type 4. Elle se retrouve tant dans Buffy la tueuse de vampires, dans Angel et dans le symbolisme du thème musical de Buffy que je me demande s'il ne s'agit pas du type de Joss lui-même.

Considérons un autre élément. Les deux séries reviennent continuellement sur le thème du pardon. Joss pose sans cesse la question : comment quelqu'un peut-il continuer à avancer sans avoir été pardonné ? Jusqu'à présent, la réponse semble être qu'il n'existe pas de faute impardonnable. Bien sûr, c'est un élément majeur de l'histoire d'Angel, mais ce n'est pas uniquement lui, et d'autres que les 4 affrontent ce problème. Il n'y a guère de personnage ou de scénario majeur qui n'aborde la question du pardon.

Qu'est ce que cela a à voir avec le 4 ? Je me souviens de ce que Clarence Thomson écrivit sur le site d'Enneagram Central au sujet d'un autre 4, Sainte Thérèse de Lisieux, dont les écrits sont centrés autour du besoin de l'indulgence de Dieu : "Si vous êtes un 4 névrosé vous pensant défectueux, vous vous demandez si quelqu'un, même Dieu, peut vous aimer. Ainsi, elle insiste courageusement sur la miséricorde divine. […] Thérèse souligne la qualité de Dieu qui est le contraire de ce qu'elle craint. Elle affirme dans sa foi que ses craintes les plus noires sont infondées." L'idée fixe du pardon dans le monde de fiction de Joss Whedon semble venir de la même place.

Je ne peux pas prétendre connaître suffisamment Joss pour avoir une certitude, mais il est difficile de ne pas se demander d'où provient sa compréhension avisée des traits du type 4. Le monde intérieur des 4 prend métaphoriquement vie, cerise sur le gâteau pour les étudiants en Ennéagramme qui regardent deux des séries de divertissement parmi les mieux écrites.

Oscar Romero

"Mon frère était toujours tourné vers l'intérieur de lui-même et pensait beaucoup trop." Le frère d'Oscar Romero le décrit ainsi quand il était enfant. Calme, prudent, timide ont été les mots le plus souvent utilisés pour le décrire, même pendant une bonne part de sa vie adulte. L'une de ses connaissances disait qu'il "restait en marge ", et il n'y avait pas de raison d'espérer que cela change.

Mais c'est l'histoire d'un type 5, qui tard dans sa vie, déjoua tous les pronostics.

Beaucoup de personnes l'ont d'abord connu lorsqu'il est arrivé à San Salvador pour servir comme Secrétaire à la Conférence des Évêques qui s'y déroulait. C'était un prêtre ayant un travail administratif, "un pasteur pour ses paperasses".

Ils racontent qu'Oscar Romero se cachait au fond de la pièce lors des réunions, "très calme et secret". "Il se tenait simplement debout à l'arrière, caché sans dire un mot." Cependant, il écoutait encore et toujours. Il se passa un certain temps avant qu'il ne trouve le courage de dire au monde ce qu'il pensait au fond de la salle. Même alors, il se cachait derrière le bouclier d'un journal, écrivant des articles déconstruisant les vues radicales des participants.

Il est plus facile de formuler ses idées sur le papier. Mais à plusieurs occasions lorsqu'il était confronté par ceux qu'il prenait pour cible, on le vit presque paralysé, incapable de répondre autrement que par des commentaires brusques et réservés. "Il ne me regardait même pas" dit une personne qui essaya de communiquer face à face avec lui. "J'ai découvert que c'était réellement un homme timide même s'il était à l'origine de débats plus que houleux."

Sa timidité pouvait être prise pour de l'arrogance. Un prêtre qui vivait dans la même communauté dit : "Je ne l'aimais pas. C'était un être insignifiant, une ombre qui passait en rasant les murs. […] Il ne prenait jamais ses repas avec nous. Il allait à la salle à manger à des heures différentes des nôtres pour ne pas nous croiser. Il était clair qu'il nous évitait et que nous avions énormément de préjugés à son endroit."

"Nous ne l'avons jamais vu participer à quoi que ce soit qui ressemble à une activité pastorale. Il n'avait pas de paroisse. Il n'allait pas aux réunions ecclésiastiques. S'il y était allé, il se serait caché dans un coin et n'aurait pas ouvert la bouche. […] Il préférait rester dans son bureau enterré sous ses papiers."

Romero travaillait bien au sein d'une hiérarchie, et réussissait inévitablement à y trouver une niche autonome, et cela pas seulement dans son activité au San Salvador qui le laissait libre de se cacher dans un bureau en y dactylographiant des documents. Déjà plus tôt dans sa carrière, il fonctionnait seul. Dans un diocèse avec un évêque pratiquant résolument le laisser-faire, il fut étonnamment productif. Mais dans son travail, il ne tenait de toute évidence pas compte de ses pairs à un point tel que quelques prêtres ont demandé à l'évêque de lui retirer sa fonction. Évidemment, cet effort n'a pas réussi. Il resta "le pouvoir derrière le trône" jusqu'à ce qu'il obtienne le poste de bureau à San Salvador.

En quelques années, il devint évêque auxiliaire, ce qui lui donna davantage de responsabilités et l'amena à l'écriture. Mais il pouvait encore se cacher. Un autre évêque disait : "Il était toujours en train de se cacher. Au séminaire où il habitait à l'époque, je connaissais trois endroits où il se cachait pour travailler ou simplement pour être à l'écart des gens. Plus d'une fois, j'ai dû faire le tour pour le chercher. Romero était un solitaire."

C'est la nature paradoxale du type 5 de sous-type social qu'un homme puisse atteindre une telle importance et une influence croissante, et encore être décrit comme calme, profondément timide, reclus, replié et bouffé par l'anxiété. Une personne dit : "Ils disaient de lui qu'il regardait toujours par terre." Ceux qui le connaissaient mieux se souviennent de lui comme quelqu'un de gentil, avec de l'humour et remarquablement généreux, traits ponctués de courtes explosions de mauvaise humeur et d'impatience.

Cette susceptibilité était remarquée lorsque les gens essayaient de l'aider. Un jour alors qu'il était parti, un groupe de femmes riches décida d'aménager sa chambre qui était simple et spartiate pour la mettre "en accord avec son mérite". Il était furieux : imaginez l'invasion de l'espace personnel d'un 5 ! Il rendit tout ce qu'elles avaient apporté et remit les vieux meubles à leur place en déclarant : "Elles ne vont pas commencer à me manipuler."

"C'est ainsi que cela se passe avec les riches", dit-il un jour en refusant des cadeaux. "D'abord, ils vous attachent avec un petit bout de ficelle de rien du tout, et ensuite ils mettent une grosse vieille corde et vous ne pouvez plus vous échapper."

Pour ceux qui souhaitaient voir l'Église prendre une position plus forte contre l'injustice sociale, son retrait personnel était emblématique de sa vision de foi : profondément pieuse et privée. Les autorités religieuses devaient traiter des aspects spirituels, laissant les affaires temporelles concernant le juridique et le système économique entre les mains des autorités civiles. Il croyait que les prêtres qui étaient inquiets pour les pauvres et les opprimés étaient corrompus par le marxisme, et en cela il était rejoint par les riches et les puissants du pays.

Ainsi les dés semblaient jetés. À l'âge de 57 ans, lorsqu'il fut nommé à son propre diocèse, il avait gagné la méfiance et parfois le mépris des membres de l'Église œuvrant pour le changement social. Pour les plus indulgents, il était quelqu'un qui "avait la tête dans les nuages, loin de la réalité, en haut des arbres comme les avocats". Au pire, il était considéré comme un ami des riches et un "inquisiteur". De l'autre côté, pour les riches et les puissants et pour beaucoup de chefs religieux, il était rassurant, sûr, calme et prudent.

Pourtant après les six années passées à gravir les échelons jusqu'au sommet du diocèse rural de Santiago de Maria au Salvador, il déménagea pour devenir archevêque de San Salvador et devint un défenseur influent et courageux de ceux qui souffrent sous le poids de violentes oppressions. Quand il fut assassiné par une balle en 1980, son nom était connu dans le monde entier.

Beaucoup voient le tournant de sa vie dans le meurtre de Fr. Rutilo Grande, un vieil ami tué par un groupement de droite quelques semaines après que Romero devienne archevêque. Les Salvadoriens parlent du "miracle de Rutilo".

D'autres, cependant, rejettent cela comme purement hagiographique. Romero lui-même ne décrivait pas ce moment une "conversion", disent-ils. Il n'était certainement pas l'ami exclusif des riches que présente la légende. Sa générosité envers les pauvres était bien connue. Certains affirment que les convictions qui ont sous-tendu ses actions en tant qu'archevêque étaient déjà présentes et fermes quand il était devenu évêque de Santiago de Maria. Ils estiment que toute cette histoire de réveil dramatique ou de conversion n'est qu'un mythe.

Mais il faut être aveugle pour nier les gros problèmes qu'il a causés aux prêtres accusés par ses articles d'être marxistes. Et à Santiago de Maria, il ferma une école pour paysans tenue par des prêtres qu'il trouvait trop radicaux. Nombre de ses contemporains racontent leur profonde déception quand il a été nommé archevêque de San Salvador. Ils savaient qu'il était le candidat favori de la classe dirigeante. "Nous nous sentions comme des moutons qui ne pouvaient faire confiance à leur berger", dit un membre d'une communauté chrétienne. Cette réaction est loin d'être unique et ils ne peuvent pas tous fabuler.

La réponse est peut-être quelque part entre les deux points de vue, et peut-être l'Ennéagramme peut-il apporter quelques éclaircissements.

Pendant ses trois années passées à Santiago de Maria, ses actions n'ont pas semblé particulièrement changer. Les prêtres qui géraient l'école pour les paysans disent de lui qu'il "espionnait" les classes à l'arrière de la salle. Et effectivement il fit fermer l'école. Mais il l'a rouverte un an plus tard.

Quelque chose a changé dans ce lieu désespérément pauvre. "Il était en train d'apprendre. Apprendre la réalité", dit un prêtre. Lorsque Romero eut vent que les ouvriers des plantations étaient payés bien en dessous du salaire minimum, il est allé sur les plantations pour constater par lui-même. Lorsque la réforme agraire fut proposée (et sabotée par les familles appartenant à l'élite), il appela un expert pour expliquer cela au clergé.

"Je n'oublierai jamais cette image de moi-même. J'expliquai la réforme agraire à tous ces prêtres, et Romero était assis sur un banc d'étudiant au premier rang, prenait des notes et m'écoutait très attentivement. Cet homme voulait apprendre", raconte l'orateur.

Et pourtant certaines choses semblent rester les mêmes. Peu de temps avant qu'il soit nommé archevêque, il donna un sermon sur une chaîne de radio nationale qui attaquait implicitement un théologien de la libération qui deviendrait plus tard un de ses proches conseillers. Un tel discours public était bien sûr davantage remarqué que l'apprentissage studieux à Santiago de Maria.

La coupure apparente pourrait être éventuellement attribuée au processus mental du 5, souvent une chose lente. Romero peut avoir ruminé, reconsidérant sa position, gardant les informations qu'il rassemblait au cas où il en aurait besoin un jour. Dans son esprit, le changement était graduel et réfléchi, mais tout était gardé en lui-même. Jusqu'à ce qu'il ait collecté toute l'information, il restait en public attaché à son statu quo intellectuel.

Il aurait peut-être pu en rester pour toujours au stade la réflexion, si le meurtre de Fr. Grande ne l'avait poussé fortement à prendre des décisions. En ce sens, ceux qui considèrent qu'il y a eu une ahurissante dramatique volte-face et l'ont appelée conversion ont également raison.

Romero lui-même nia que c'était une conversion. Cela semble étrange en un sens, étant donné que son appel constant était à la "conversion". On pourrait penser que reconnaître son propre changement comme un exemple serait aidant. Mais outre la nature graduelle du changement, sa position peut avoir été simplement de l'auto-protection : on rapporte que les autorités du Vatican l'ont interrogé sur le terme utilisé par les autres à son propos. Ce pourrait aussi être l'aversion du 5 pour l'auto-divulgation, et une manière de compartimenter les différentes périodes de sa vie. Il travailla avec de nombreuses personnes avec lesquelles il avait été en désaccord et nombre d'entre elles ont remarqué — trouvant étrange ou irritant — qu'il ne reconnaissait jamais ouvertement leur passé conflictuel.

Quelle que soit la nature du changement, il fut également accompagné d'une transformation personnelle. Le timide et replié Romero devint de plus en plus engagé dans le monde.

Bien sûr, ce changement-là non plus ne se fit pas en une nuit comme le dit une histoire récente. Sur les conseils de quelques prêtres, il commença à visiter les communautés pauvres rurales, et une des premières visites ne se passa pas très bien. Après avoir passé un jour à rencontrer des gens et à marcher sur un sol rocailleux et des routes sales, il refusa un rafraîchissement que lui proposait une communauté et dit : "Non. Je veux seulement m'en aller d'ici."

Une des femmes présentes ce jour-là se souvient : "Et il partit. Il dit qu'il voulait renter à San Salvador dès que possible. Il dit cela comme s'il était fou. Il nous planta là avec les projets que nous avions organisés pour lui. Nous étions si déçus que nous en pleurions."

Mais avec le temps, ces histoires devinrent celles d'accueils joyeux par la population, de Romero répondant avec reconnaissance, en interrelation avec les gens et acceptant les simples cadeaux dont il était comblé. Un jour, il revient sur le lieu de cette première visite et demanda pardon.

Peut-être le plus important était la pleine réalisation du superbe cadeau que font les personnes de type 5 : celui de communiquer au monde leur connaissance si difficilement gagnée. Par ses homélies et ses émissions radiophoniques, il devint un professeur au Salvador et au-delà. Ne durant jamais moins d'une heure, ses sermons portaient à la fois sur les analyses théologiques et sur un pointage des événements de la semaine, tous les rapports des violations des droits de l'homme censurées par la presse.

Une femme lui dit : "Vous êtes toujours si calme lorsque je vous vois, Monseigneur. Et quand je vous entends dans la cathédrale, j'ai l'impression que vous devenez une personne différente, même dans l'intonation de la voix. Vous projetez une telle force et une telle certitude. […] Cela ne peut pas être dû uniquement au microphone."

En fait, durant toute sa carrière, il avait une réputation de bon prêcheur, mais maintenant il avait un pays tout entier buvant chacune de ses paroles, des paroles qui étaient si menaçantes pour ceux qui étaient au pouvoir que finalement ils le tuèrent afin de réduire cette voix au silence.

C'est un exemple dramatique et émouvant du courage social, moral et physique qu'un 5 peut manifester lorsqu'il s'intègre dans le monde, l'enrichit avec ses ressources internes et dirige avec confiance.

Au cours d'une discussion à propos de Romero, une amie de type 5 tira du Bouddhisme une jolie métaphore de cette intégration du 5 en 8. Elle établit le parallèle entre sa vie et l'idéal de Bodhisattva dans le Bouddhisme : après que Romero ait atteint l'illumination, il est revenu pour libérer les autres.

Ce n'était pas qu'il perdit toute peur, et la peur était justifiée dans une situation où la mort violente était une possibilité réaliste. Une personne se souvint de sa nervosité après une homélie particulièrement audacieuse et dit : "C'était un poltron et il le savait. C'était un prophète et il ne le savait pas."

Note : la plupart des histoires de cet article proviennent d'Oscar Romero : Mémories in Mosaic par Maria Lopez Vigil. Cet ouvrage est disponible auprès de : EPICA, 1470 Irving St. NW, Washington DC 20010, (202) 332 0292.

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Teresa Malcom est la créatrice du site Internet Star Trek & the Enneagram : www.enneatrek.com. Son adresse email est : tem4w5@yahoo.com.