Les 6 en psychothérapie
Carolyn Bartlett (Traduction par Sevan Sirapian)
Présentation en thérapie
- Les 6 phobiques peuvent être anxieux de manière apparente et scruter les alentours ; certains ont les yeux écarquillés et un discours saccadé.
- Les 6 contre-phobiques peuvent rechercher la confrontation et être agressif.
- Les 6 peuvent émettre des interrogations, des « oui, mais… », des déclarations contradictoires.
- Les 6 peuvent être méfiants ou soupçonneux vis-à-vis de l'autorité du thérapeute.
- Les 6 peuvent parler de scénarios catastrophe.
- Les 6 se perçoivent généralement comme moins puissants que les autres, voire totalement victimes.
- Les annulations de dernière minute sont plus probables qu'avec les autres ennéatypes.
- Les abus de substances toxiques peuvent dans un premier temps soulager l'anxiété et le doute d'un 6 en détendant son système nerveux.
Quand les 6 deviennent dépendants à ces substances, ils peuvent s'isoler des autres qui sont potentiellement des soutiens émotionnels et des aides pour garder les pieds sur terre. Les substances toxiques peuvent s'associer à cette isolation pour amplifier une paranoïa.
Lorsqu'ils sont intégrés, les 6 ont une clarté mentale aiguë et sont extrêmement perspicaces. Ils ont d'excellentes intuitions exactes à propos des situations et des gens. Ces capacités se prêtent à la résolution habile de problèmes et à une vision créative de perspectives communes.
Lorsqu'ils sont dans leur schéma de désintégration, les 6 interprètent régulièrement les intentions des autres comme malveillantes. Ils peuvent se retirer dans la paranoïa, devenir accusateur et ne plus tenir leurs engagements envers eux-mêmes et envers les autres.
Le style d'attention des 6 se focalise sur les dangers. Ils sont loyaux, ont un sens de l'humour cocasse et sont conscients de choses qui échappent à d'autres. Enclins au doute, ils peuvent voir le revers de n'importe quelle affirmation. Ils remettent l'autorité en question mais cherchent tout de même une autorité compétente à laquelle se fier. Les 6 gèrent la peur de deux façons, apparemment opposées : en étant phobique et en évitant ce qui leur fait peur ou bien en devenant contre-phobique et en défiant leurs peurs. La plupart des 6 vivent dans une continuité d'états entre ces deux pôles.
La culture américaine actuelle a sûrement une propension à la peur, mais la "pensée positive" fait partie de notre image idéalisée de la santé mentale. La psychologie populaire présente aussi les pensées négatives comme malsaines et le fait d'être optimiste comme idéal. Les 6 sont tout à fait conscients de ce penchant culturel et de leur différence de style : « Lorsque j'imagine la pire chose qui puisse arriver et que je peux l'accepter, ça me donne le courage d'agir. C'est en fait une bonne chose. » La pression de la pensée positive s'oppose frontalement à la stratégie de base du 6.
Expériences de l'enfance et défenses de l'âge adulte
Les 6 ont une foi naturelle innée et fondée sur leur intuition, qui leur donne le courage de faire face à la vie dans l'instant. Dans l'enfance, cependant, ils ressentent souvent les gens ayant une autorité ou en position de confiance comme imprévisibles, trompeurs, voire dangereux. Même si c'est à des degrés différents, beaucoup de 6 se souviennent avoir ressenti que leur sens fondamental de sécurité et de confiance a été blessé : « La discipline et le comportement de ma mère étaient très changeants. Mes parents se battaient fréquemment verbalement et physiquement. Je ne savais jamais quand ça allait se produire, même si la tension dans l'air était souvent un avertissement. Je peux donc comprendre pourquoi ma peur fut toujours là. »
Les enfants 6 apprennent à éviter les surprises en anticipant le danger à venir. Alors que cette focalisation peut les sensibiliser au danger réel, elle les amène aussi à perdre contact avec le présent et à se rattacher à des suppositions craintives inexactes. Un génogramme montrera généralement un environnement dans l'enfance où l'hyper-vigilance et le doute de l'enfant 6 étaient la meilleure défense disponible.
Les 6 protègent leur vision du monde avec le mécanisme de défense de la projection – attribuant à d'autres personnes ou objets leurs propres pensées, sentiments, intentions ou désirs inacceptables. Lorsque cette défense est active, les 6 voient leurs problèmes intérieurs comme appartenant à des forces extérieures. La projection peut être positive ou négative mais les autres sont perçus comme plus grands et plus puissants. En attribuant autorité, force ou ses propres sentiments indésirables aux autres, un 6 qui projette évite les responsabilités. Cela protège une image de soi de quelqu'un d'impuissant et d'innocent face au conflit ou à la difficulté.
Un 6 dit : « Souvent j'entends les mots “ne vous inquiétez pas” sortant de ma bouche, adressés à d'autres personnes alors que ce n'est pas vraiment leur problème. Ils sont peut-être en train d'assumer un moment difficile dans leur relation mais ils ne disent pas “C'est la fin de mon mariage, je suis vraiment inquiet.” Je le suis. Ma réaction personnelle est ce sentiment anxieux de fatalité imminente, alors je leur dis de ne pas s'inquiéter. »
Ce qui amène les 6 en thérapie
Les 6 sont motivés à suivre une thérapie à cause d'une anxiété chronique, d'une confusion à propos des relations et des pertes. Ils peuvent aussi vouloir des conseils venant d'une figure d'autorité compétente. En outre, lorsque les 6 arrivent à une période calme de leur vie – peut-être ont-ils une profession intéressante et qui rapporte ou une relation aimante stable – leur vie mentale chaotique devient incohérente avec les faits. Ils cherchent une thérapie pour résoudre l'incongruité et pour empêcher leur anxiété de gâcher une bonne chose.
Si les 6 entrent dans des domaines nécessitant des compétences élevées – comme le monde des affaires – sans être rattachés à des valeurs solides, cela peut précipiter une crise. Ils peuvent commencer à douter de leur compétence. Leur tendance à remettre les choses en question et leur besoin de solidarité de groupe deviennent handicapants dans une atmosphère de compétition. Ils peuvent également se sentir victimes de leur propre succès : « Je voulais faire beaucoup d'argent rapidement. Je suis allé dans la vente et j'ai atteint le sommet rapidement. Mais la pression de ce qui aurait pu se passer si j'avais été incapable de maintenir mon succès était accablante. J'ai commencé à boire et je me suis senti de plus en plus isolé. J'ai trouvé de l'aide par un heureux hasard. »
Ce qui ne marche pas
Les 6 que j'ai interviewés étaient généralement enclins à percevoir leur thérapeute comme une figure d'autorité manquée. Certains étaient déçus par des thérapeutes qui essayaient de travailler hors de leur domaine de compétence : « Après avoir été agressée sexuellement par un ecclésiastique, je suis allée chez une psychologue et je lui ai fait faire un apprentissage difficile. Je ne pense pas qu'elle comprenait suffisamment ce qu'est un viol au début. Elle ne m'a pas initialement conseillé de m'éloigner de cet homme ou de raconter à quelqu'un ce qui s'était passé. J'étais terrifiée à l'idée de nuire au pasteur et j'ai donc gardé le silence jusqu'à ce que je quitte l'église après plusieurs mois. Si la psychologue m'avait expliqué la nature et les conséquences d'un adultère dans le cadre professionnel, et si elle m'avait dit d'aller voir des services d'aide aux personnes violées plus tôt, ça m'aurait aidé. La thérapeute a vraiment appris et a fourni des rapports utiles à l'église plus tard. Mais les premiers jours furent un problème. »
Plus tard, on envoya cette même 6 chez un psychiatre et elle sentit que son besoin de sécurité était ignoré par mégarde : « On m'a envoyé chez un psychiatre pour des médicaments lorsque j'étais suicidaire. Une fois, il a autorisé sa secrétaire à partir plus tôt et j'étais seule dans l'immeuble avec lui. J'ai flippé, mais je n'ai pas pu lui dire pourquoi avant un moment. »
Plusieurs 6 ont déconseillé les approches où l'autorité du thérapeute ou le processus thérapeutique n'est pas mise en question : « Je suis allé chez un thérapeute analytique quand j'étais dans une grande souffrance. J'ai commencé ce processus, donc je suis resté même lorsque ça me faisait me sentir encore plus mal. J'ai juste continué à céder mon autorité. Je suis resté trop longtemps. » Un autre 6 dont le thérapeute avait des idées qui s'opposaient à sa propre expérience dit : « J'ai essayé de suivre le thérapeute plutôt que de rester dans mon propre processus. Lorsque le thérapeute m'a catalogué, ça m'a blessé et ça a pris beaucoup de temps pour réparer ses interprétations. Les 6 sont vraiment bons pour cacher des indices, donc il n'aurait pas pu savoir. »
Si un thérapeute répond aux doutes et aux questions d'un 6 en essayant de le coincer, cela peut empirer les choses : « En thérapie, je peux être provocateur et mes idées sont contradictoires. Mais si le thérapeute peut seulement approuver ma façon de voir, cela me permet de m'assumer. Si le thérapeute a besoin de me défier ou de se disputer, et par conséquent d'affirmer son autorité, alors ça reproduit mon problème. Mais si le thérapeute est capable d'être de mon côté, c'est la chose la plus agréable. Mais je me demande : pourquoi je ne peux simplement pas les laisser de mon côté ? Je le veux tellement, mais j'ai peur que ça ne soit pas sincère ou qu'on m'abuse. Alors je garde mes distances et j'attends. »
Certains 6 se souviennent de thérapeutes qui étaient trop mentaux, qui donnaient trop d'informations sans créer de lien interpersonnel : « J'ai eu un thérapeute qui était grisant et qui lisait beaucoup. Il donnait un nom aux choses qui se produisaient mais ça déclenchait une longue chaîne de pensées dans ma tête. Il m'a donné un livre à lire ; il y avait de bonnes idées mais ça n'a pas servi car j'avais besoin que les idées soient présentées dans le cadre d'une relation. »
D'autres 6 ont été frustrés pas des thérapeutes qui ne fournissaient pas un contexte suffisant : « Je suis allé chez des thérapeutes qui m'ont abordé cognitivement. J'en ai vu un qui faisait de l'EMDR. Mes cauchemars ont cessé du jour au lendemain mais je n'ai pas pu intégrer ce qui s'était passé. J'ai décidé de ne plus retourner voir cette personne. Je voulais comprendre le processus. »
Les 6 disent aussi que les thérapeutes essaient souvent de les sortir de leurs scénarios-catastrophe à force d'argumentation : « Les pires possibilités arrivent réellement aux 6. C'est frustrant lorsque les thérapeutes ne le croient pas. » Un thérapeute pourrait essayer de convaincre un 6 anxieux que les choses ne vont pas si mal, une tactique qui aggrave généralement l'anxiété et le sentiment d'aliénation du 6. Le 6 peut avoir l'impression que le thérapeute n'écoute pas attentivement ou ne saisit pas la complexité de sa situation.
Plusieurs 6 ont mentionné avoir eu le sentiment d'être poussés à accepter les solutions du thérapeute. Plutôt que d'écouter, le thérapeute pourrait essayer de réprimer les doutes d'un client en imposant ce qu'il pense être utile. Alors que donner des conseils peut aider, si le client répond sans cesse par « oui, mais… », ne faire que répéter le conseil peut lui laisser l'impression de ne pas être compris.
Au cours du transfert, les 6 peuvent projeter leur propre autorité sur le thérapeute, soit en l'idéalisant, soit en le dévalorisant. Un thérapeute pris dans un contre-transfert avec un client 6 pourrait devenir anxieux, comme s'il avait « attrapé » l'hyper-vigilance nerveuse du client. Le thérapeute pourrait se défendre contre sa propre anxiété en jouant avec la projection de l'autorité du client, en agissant de manière paternelle et rassurante. Bien que cela puisse être temporairement réconfortant, le client pourrait sentir que le thérapeute a cessé d'être authentique, ce qui serait vrai et conforterait le client dans sa méfiance.
Quelques clients 6 expriment leur doute et leur anxiété en annulant leur rendez-vous à la dernière minute, se raccrochant à l'option de la thérapie tout en luttant contre leur ambivalence. Cependant, le thérapeute pourrait voir cela comme passif-agressif. Le thérapeute peut éviter de se sentir exploité en abordant tous les transferts et contre-transferts implicites aussi bien qu'en fixant des limites claires.
À l'époque du soin dirigé – où les représentants des compagnies d'assurance, plutôt que les clients et leurs thérapeutes, décident du montant et du type de traitement dont un client bénéficiera – l'autorité ultime pour le traitement peut ne pas être claire. Pour des clients 6 qui ont une assurance, cela peut être un conflit particulier. Si une compagnie d'assurance dit qu'un client doit avoir terminé sa thérapie après dix sessions et que le client n'a pas terminé, qui est l'autorité ? Le client a-t-il échoué s'il a besoin de plus de sessions ? Puisque les compagnies de soin dirigé sont motivées par le profit alors que les clients connaissent leurs propres besoins, les thérapeutes peuvent utiliser cette situation difficile pour explorer les problèmes liés à l'autorité et aider les 6 à entrer en contact avec leur propre vérité.
Les 6 disent que lorsqu'ils se sentent sur la défensive en thérapie, ils peuvent devenir phobiques et ambivalents, agressifs de manière inattendue, ou encore intellectuels et théoriques :
- « Prendre des décisions devient impossible. Je passe du oui au non, allant et revenant, doutant de moi et plein d'incertitudes. Je cherche des réponses chez les autres. J'ai une forte envie de fuir. »
- « J'explose et je rends les situations ou d'autres personnes responsables de mes émotions. J'explose avec un degré de colère hors de proportion par rapport à la situation. Parfois, je me retire et je deviens trop émotionnelle mais je n'arrive pas à identifier ce qui se passe. D'où les problèmes précédents. »
- « Je ne parle pas toujours avec des termes accessibles, et me sentir incompris est un énorme problème. Je me mets sur la défensive et si ma défense est contestée, toute mon énergie constructive est nécessaire pour me protéger d'une erreur d'appréciation à mon propos, et cela empêche la thérapie d'avancer. J'ai besoin que le thérapeute contourne l'impasse linguistique, qu'il me laisse le bénéfice du doute. Ne vous opposez pas, ou du moins soyez très respectueux, ne jugez pas et montrez que vous vous efforcez de comprendre. »
- « Donnez-moi un feedback, mais ne vous battez pas ou ne vous engagez pas dans un conflit ou un débat. »
Ce qui marche
Plus que tout autre ennéatype, les 6 parlent de l'importance de la relation thérapeutique et de l'intégrité personnelle du thérapeute. Ce que le ou la thérapeute a fait était plus important que ce qu'il ou elle a dit.
Plusieurs 6 se souviennent de thérapeutes qui étaient en retard aux rendez-vous et de l'anxiété que cela créait. L'une dit que sa thérapeute « était en retard toutes les semaines. Quand j'ai fini par lui dire, elle a reconnu qu'il y avait un problème. C'était important pour elle de m'approuver. Elle a dit “je vois à quel point ça peut vous contrarier”. Plus important, elle a changé de comportement. Sa sincérité était cruciale. » Un autre 6 raconte un malentendu avec son thérapeute sur l'horaire d'un rendez-vous, où ils ne savaient pas exactement qui s'était trompé. Le thérapeute n'accusa pas ni ne s'excusa mais reconnu calmement le problème et fixa un autre rendez-vous. Un autre 6 dit : « Ma thérapeute était en retard, elle s'est excusée mais elle a aussi donné un exemple en respirant profondément et en revenant à l'instant présent. Il y a des moments où elle parle beaucoup. Puis elle s'arrête, revient à l'instant présent et s'assoit simplement avec moi. »
Une cliente 6 se rappelle avoir paniqué quand sa thérapeute lui demandait à la fin de chaque session si elle voulait reprendre rendez-vous. La cliente partait en vrille dans le doute de soi, se demandant : « Essayait-elle de me dire que j'en ai fini avec ma thérapie ou que je devrais en avoir fini ? Avais-je le droit de prendre autant pour moi ? Est-ce que je ne méritais pas une autre session ? Pensait-elle que j'inventais des problèmes ? Etc. »
Ce fut une illumination pour moi car je demande parfois aux clients s'ils veulent reprendre rendez-vous. Lorsque j'ai une idée précise de ce sur quoi nous pourrions travailler lors de la prochaine session, je pose la question pour leur rappeler que le choix leur appartient. Je n'avais pas idée que la question pourrait attiser le doute de soi, bien que cela fasse sens dans une vision du monde pleine de peur. Ces dynamiques de la relation, apparemment subtiles, montrent comment le processus thérapeutique a souvent lieu à d'autres niveaux que la rencontre thérapeutique, au-delà des techniques et des interventions que nous, thérapeutes, considérons comme facteurs de changement.
La recherche du 6 d'une autorité digne de confiance est également évidente dans la manière d'examiner personnellement les thérapeutes : « Je ne me laisse pas tromper par ce qui est faux. Le thérapeute doit être vrai, et si vous faites une erreur, ne la justifiez pas. Confirmez le problème, soyez intègre, et excusez-vous. » Un 6 explique : « La confiance doit être renouvelée chaque semaine. Ne supposez pas que, parce que j'avais confiance en vous la semaine dernière, c'est désormais automatique. » Évidemment, un peu de confiance est reportée d'une session à l'autre, mais si un client 6 a un moment de panique ou de peur, le thérapeute ne devrait pas trop compter sur la continuité. Il est parfois important, par exemple, de vérifier s'il n'y a pas d'interprétation déformée, en comparant ce que vous venez de dire avec la manière dont le client l'a interprété.
Les 6 peuvent attribuer une omnipotence aux thérapeutes et en attendre une protection contre tout inconfort possible. L'exemple de la cliente qui a paniqué lorsqu'elle s'est retrouvée seule avec son thérapeute soulève plusieurs questions pertinentes à propos du travail avec cet ennéatype : à quel point le thérapeute doit-il anticiper et pourvoir aux besoins d'un client 6 ? Quand est-ce qu'un thérapeute fait face aux attentes irréalistes d'un client qui cherche un re-parentage parfait de la part d'une autorité infaillible ?
Même si les thérapeutes lisant ses descriptions peuvent avoir l'impression qu'il faut être extrêmement prudent avec leurs clients 6, essayer d'éviter complètement les situations dans lesquelles un 6 pourrait se sentir anxieux n'est pas possible, ni d'un grand secours. En fait, il peut être nécessaire d'identifier et de révéler la demande du client 6 que les autres lui apportent de la sécurité plus que de raison, car cela dévoile une dépendance de base qui le bloque. Ils peuvent cesser leurs projections et affirmer davantage leur autorité. Travailler directement avec cette dynamique lorsqu'elle se produit dans la relation thérapeutique peut être une occasion en or pour une pratique corrective.
La combinaison du fait d'envisager le pire et celui de projeter amène souvent les 6 à se considérer à la merci de forces qu'ils ne contrôlent pas. Ils conseillent aux thérapeutes de compatir au début avec leur sentiment de désespoir. Le thérapeute peut ensuite demander aux 6 ce qu'ils se disent lorsqu'ils se sentent victimes ou qu'ils n'ont « pas de chance » : « Pour moi, quand les choses tournent mal, je le prends très personnellement et je me dis que c'est la preuve de ce qui ne va pas chez moi. » Pour aider à résoudre un problème direct, un 6 suggère que le thérapeute dise : « Il semble que l'on vous ait fait du tort. Étant donné cela, que pouvez-vous faire ? Qu'avez-vous fait dans le passé qui a été utile lorsque des problèmes comme celui-ci se sont produits ? »
Lorsqu'un thérapeute travaille avec des clients 6 accablés par la peur, un 6 lui conseille de demander : « Que vous diriez-vous à vous-même dans cette situation ? » L'idée est de susciter l'auto-observation du client et son autorité interne plutôt que d'avoir un thérapeute donnant des conseils et des points de vue. La réponse à une telle question peut également aider le 6 à se connecter aux événements du monde réel dont est née une réaction névrotique : « La plus grande aide est de reconnaître ce qui est effectivement en train de se passer, même si je ne comprends pas réellement pourquoi je réagis de manière excessive. » Une autre 6 a demandé à un thérapeute potentiel de « travailler pour m'aider à me rendre compte de ma propre autorité. » Un autre 6 ajoute : « Le meilleur thérapeute me rappellerait ce que je sais déjà, ce qui dissipe ma confusion et ma manière de penser déformée. »
Lorsque les réactions actuelles d'un client 6 restent accablantes et inchangées par de nouvelles perspectives cognitives, on gagne à chercher l'influence d'une blessure passée. Certains types d'imagerie mentale guidée et de travail inconscient peuvent chasser les peurs remémorées d'un 6 et lui permettre de rester réaliste dans le présent et le passé. Réexaminer les traumas passés et comprendre comment le client a interprété ces événements peut également aider. La femme qui avait été violée par son pasteur dit : « J'avais particulièrement tendance à prendre la responsabilité du comportement du pasteur. J'ai aussi appris que je croyais vraiment être responsable des problèmes de mon enfance. Lorsque j'ai vu le lien entre mon père et le pasteur, j'ai compris que je n'étais responsable ni de l'un, ni de l'autre. » Réparer l'auto-accusation déformée du passé autorise les 6 à avoir confiance en ce qu'ils savent au présent.
Un autre 6 ajoute : « Une relation de confiance, de sécurité et d'honnêteté est essentielle. Je pose un tas de questions. Lorsque la thérapeute répondait à mes questions, ça m'aidait à me sentir assez sécurisé pour mentionner les problèmes difficiles. C'était également bien que la thérapeute “garde la foi” tout le long du processus thérapeutique. Elle a reflété la foi pour moi – à l'intérieur de moi. »
Comprendre la peur et travailler sur la colère
Lorsqu'ils ont peur, les 6 accumulent des arguments contre d'autres personnes, ce qui entraîne parfois des éclats de colère qui laissent les autres interloqués. Ensuite le 6 peut se retirer. Ce comportement en dent de scie joue sur les relations, faisant marcher les autres sur des œufs ou les faisant éviter le 6 : « Ce qui provoque l'explosion est le manque d'affirmation de soi, le fait de ne pas exprimer ses émotions. J'ai peur de ce qui arriverait si j'exprimais un besoin. Les émotions s'accumulent et ça m'amène à projeter mon intention sur les autres. En tant que 6, je dois apprendre à faire attention à ces émotions. »
« Mon thérapeute m'a fait me concentrer sur mes processus internes. Il me posait des questions comme “Quand votre colère débute, qu'est-ce que vous ressentez ?” J'ai pu localiser avec précision que ça commençait par une tension dans la bouche, un serrement dans la mâchoire. Ensuite je pouvais tuer la réaction dans l'œuf. Avant cela, j'étais émotionnellement illettré. J'avais besoin d'apprendre ce qu'étaient mes émotions, de les nommer et de comprendre d'où elles venaient. » D'autres 6 sont d'accord pour dire que cela aide d'apprendre à la fois à identifier et à communiquer leurs émotions avant qu'elles ne s'intensifient : « Pendant le travail sur la peur et la colère, il est utile de voir les liens avant que la pression n'augmente trop et qu'il y ait une explosion totale. J'ai appris à exprimer quelque chose lorsque c'est encore faible au lieu de le considérer uniquement comme de la colère quand ça prend de l'ampleur. »
Les 6 peuvent devenir soudainement accusateurs et colériques pendant l'heure de thérapie, généralement en thérapie de couple. Ils peuvent ensuite être piégés par leur propre réaction : « Après l'explosion, je suis conscient des effets de l'accès de colère, de la peur des conséquences et du châtiment. Mon moi accusateur se présente et dit “tu as fait du mal”, “te voilà qui recommences.” Je me sens coupable. Ça peut être difficile de sauver l'heure de thérapie. Il me faut 15 à 20 minutes pour récupérer.
« C'est la même chose que lorsque j'étais petit et que j'essayais de faire comprendre quelque chose à mes parents. Je voyais littéralement rouge, ensuite les objets volaient et j'étais incontrôlable. Puis il y avait réellement des conséquences et un châtiment. »
Sans nier qu'il faut qu'il change ce comportement, le 6 suggère que le thérapeute « y aille doucement lorsqu'il faut se confronter à la blessure. Répétez vos observations, mais allez-y doucement. Permettez-moi d'être dans le déni pendant un moment. J'ai besoin de l'entendre, de lutter avec ; je peux nier mais j'y réfléchis vraiment. » Ce 6 recommande également que le thérapeute reste direct et spécifique en demandant : « Contre quoi êtes-vous en colère en ce moment ? Que venez-vous d'entendre ? Comment interprétez-vous ce qui vient d'être dit ? » Ou dire quelque chose comme : « J'ai l'impression que vous êtes vraiment en colère en ce moment même. » Ou demander : « Quelles pensées avez-vous en ce moment même ? »
Les 6 ont tendance à se voir comme petits et à voir les autres comme grands. Nier immédiatement l'impact de leur agression maintient intact leur image de soi de celui ou celle qui est vulnérable : « En thérapie de groupe, les gens m'ont aidé à prendre conscience de mon comportement et m'ont appris à être témoin de mes actions. Voir l'évidence contredit l'impuissance que j'aime maintenir. »
Les 6 sont également loyaux et restent parfois dans des relations visiblement abusives, bien qu'ils ressentent colère et ressentiment. Les 6 veulent que leurs thérapeutes comprennent que même s'ils peuvent sembler loyaux à l'excès, ils cherchent en fait la sécurité : « Vous devez comprendre que la loyauté concerne la survie de la meute. Il s'agit de sécurité et d'essayer de repérer le plus faible. Lorsque vous changez de style de vie, vous abandonnez les relations qui ne collent plus. Bon, vous pourriez les conserver, mais seulement par habitude. Un thérapeute pourrait alors poser une question du genre : “À quoi vous sert cette relation maintenant ?” et commencer à explorer la signification plus profonde de la loyauté du 6. »
Projection
Dans un article du Psychotherapy Networker, Graham Campbell, spécialiste du traitement des troubles de l'anxiété, fait ce commentaire : « Les remarques de soutien aident parfois les gens déprimés. Ils sont comme des éponges qui absorberaient ce qui leur est envoyé. Mais les clients anxieux ont une couche de téflon et les commentaires de soutien ne font que leur glisser dessus. Les personnes déprimées ont tendance à se sentir coupables et inadaptées. Par conséquent, elles ont l'impression qu'elles doivent changer. Les personnes anxieuses aussi se sentent coupables et inadaptées, mais elles ont plus tendance à penser que quelque chose d'autre doit changer. Elles objectivent ce que les déprimés personnalisent. »
Les clients 6 se présentent souvent aux thérapeutes comme anxieux et déplacer le centre de contrôle de l'extérieur vers l'intérieur est crucial pour progresser. La projection est la « couche de téflon » du 6 ; elle maintient la responsabilité sur les autres pendant que le client attend que ces derniers ou que « quelque chose d'autre » changent. Même si cette mentalité apporte un certain confort psychologique – « au moins, ce n'est pas moi le problème » dit un 6 – la maintenir est une proposition malhonnête auto-réalisatrice.
Pour travailler habilement avec la projection, les thérapeutes doivent comprendre comment les clients la ressentent : « Au fond, ce qui se passe dans ma tête est tellement plus réel que ce qui se passe effectivement. » Beaucoup de 6 disent qu'apprendre à admettre leurs projections leur a été spécialement d'un grand secours : « Lorsqu'on m'amenait doucement à voir mes projections, ça aidait. J'en suis tellement peu conscient que supposer que je les verrais toujours est une erreur. M'aider à voir les manières dont je projette, y compris ce que je projetais sur la thérapeute, a été très instructif. »
La projection se fait au prix, entre autres, d'un blocage ou d'une interruption de l'intimité puisque la vision des autres par les 6 cesse d'être exacte. La vérité sur les autres – qu'ils sont également des êtres humains vulnérables faisant de leur mieux – est quelque chose que les 6 acceptent uniquement lorsqu'ils affirment leur propre autorité. Les 6 conseillent aux thérapeutes de les aider à intégrer leur autorité, aussi bien qu'à comprendre émotionnellement la vulnérabilité des autres : « L'une des choses qui m'a aidé est d'essayer de me mettre à la place de l'autre, de m'interroger sur les raisons de ma colère à propos de son comportement alors que j'agis parfois de la même manière. J'avais besoin d'accepter d'être plus responsable et de faire face à la complexité de la vie. »
Plusieurs 6 disent qu'apprendre qu'ils avaient du pouvoir a été important, mais en même temps difficile à cause de leur image de soi d'impuissance qui fournissait une protection : « Les situations dans lesquelles j'ai plus de pouvoir que les autres sont stressantes. J'ai peur de réussir. La thérapie m'a aidé à regarder en face mes réussites et mon pouvoir. J'avais l'habitude de simplement l'ignorer lorsque je le voyais. J'avais l'habitude d'abandonner mon point de vue immédiatement. Maintenant, je peux m'y tenir. » Une autre 6 ajoute : « Cela aide de voir les autres comme ayant les mêmes insécurités et de voir que j'ai une influence sur eux. J'ai du pouvoir et j'évitais de le reconnaître. Je m'habillais décontractée, conduisais une voiture bousillée. Si je n'ai pas de fierté et pas de pouvoir, alors j'évite l'envie et la vengeance de la part des autres. »
Un 6 dit que son thérapeute utilisait l'imagerie mentale guidée pour passer en revue ses interactions avec les autres pendant la semaine, se concentrant exclusivement sur l'impact du 6 sur les autres : « Le thérapeute me posait des questions comme “Quelle était l'expression de son visage lorsque vous avez dit ça ?” La défense la plus difficile à abandonner a été celle de me voir comme ayant moins de pouvoir que les autres. C'est vraiment libérateur de l'abandonner, humiliant de se rendre compte à quel point c'était omniprésent. Une fois que cette prise de conscience – que j'ai une influence sur les autres – a débuté, elle s'est vraiment renforcée d'elle-même. » Voir que les autres sont vulnérables de la même façon permet également plus de relations satisfaisantes.
Une autre conséquence de la projection est que les 6 peuvent être paralysés par leur peur et compliquer plus que de raison leur ligne de conduite. Une approche utile est d'aider les clients à décomposer un problème et à le simplifier : « Ce n'est que maintenant que j'apprends à peine à décomposer les choses en morceaux que je peux gérer. Si j'ai peur de passer un coup de fil à quelqu'un, ma thérapeute va me demander, “Pouvez-vous vous engager à appeler quelqu'un au cours les deux semaines à venir ?” Et elle va suivre l'action lors de la prochaine session. Parfois il est utile d'avoir des directives claires. »
Certains 6 trouvent utiles des approches cognitives pratiques. Ils disent qu'apprendre des choses sur les étapes de développement de la vie de famille leur fut bénéfique et normalisant. D'autres clients ont apprécié qu'on leur présente des principes très simples à appliquer dans la vie : « Une thérapeute m'a dit : “Soyez utile à chaque fois que vous le pouvez.” Je me souviens toujours de ça et ça m'aide lorsque je suis dépassé. »
Le corps comme fondation
Les 6 conseillent aux thérapeutes de les aider à déplacer leur attention de leur tête vers leur corps : « Je peux rester dans mon esprit et intellectualiser presque tout. Je ne suis pas toujours conscient de mes émotions, mon cœur ou mon corps. Ma thérapeute m'indique le chemin vers mon cœur et des endroits du corps. J'ai une résistance à cela et je retourne très vite à mon mental, spécialement lorsque je commence à avoir peur. Ceci dit, quand la thérapeute me ramène doucement vers mes sensations corporelles, mes réactions instinctives et mes émotions, ça aide. » Une autre 6 ajoute : « Mes premières expériences en thérapie ont consisté uniquement à apprendre à sentir mon corps. Ce gars m'a juste appris des techniques de relaxation. C'était il y a trente ans et je m'en sers toujours. »
Un 6 se rappelle avoir été aidé par un hypnothérapeute qui acceptait ses doutes mais sans se laisser prendre dedans. Au lieu de cela, il a appris au 6 à écouter son corps : « J'ai vu un gars pendant cinq ans, il a écrit un bouquin sur l'hypnose. Il faisait des phrases courtes conçues exprès pour me mettre en colère et m'aidait ensuite à situer ma réaction au niveau de mon corps. Je ne lui faisais pas confiance parce que je ne fais confiance à personne. Lorsque j'exprimais un doute, il le relevait mais il m'encourageait ensuite à revenir à ma réaction physique. Quelque chose m'en est resté. »
Plusieurs 6 recommandent des pratiques auxiliaires comme le Taï Chi et les arts martiaux pour conserver la connexion au corps au-delà du bureau du thérapeute. Le massage et d'autres expériences physiquement relaxantes ont également aidé. Une 6, victime d'abus sexuel, dit que le « Model Mugging », un programme d'entraînement d'autodéfense, fut « incroyablement efficace » pour diminuer sa peur et accroître sa confiance.
Le Model Mugging réentraîne la mémoire du corps et le mental de la victime pour qu'elle puisse régir différemment lorsqu'elle anticipe ou se souvient d'une attaque. Cela est réalisé en reconstituant physiquement des scènes d'attaque dans un environnement de groupe de soutien, avec des instructeurs en tenue bien rembourrée jouant les agresseurs. Le but est d'apprendre aux participants à fixer des frontières solides et à répondre à l'attaque efficacement.
Une victime d'attaque de n'importe quel ennéatype peut retirer des bénéfices de ce genre de travail. Cependant, pour la 6 citée ci-dessus, qui connaissait l'Ennéagramme et trouva les côtés négatifs de son ennéatype amplifiés suite à l'attaque, le Model Mugging atténua fortement la peur et le doute de soi.
Les thérapeutes qui offrent aux clients 6 une attitude calme, posée et des moments de silence peuvent aider : « J'ai un grand cercle de gens et d'idées dans lequel je tourne en rond, et j'ai besoin de fondation. Le meilleur thérapeute pour moi est quelqu'un qui est intégré dans son cœur, sa tête et son corps et qui m'aborde depuis un endroit profondément spirituel. Le thérapeute me rappelle de ralentir, d'être dans mon corps, et d'apprendre à laisser des désordres advenir. J'ai également besoin d'aide pour revivre des souvenirs et leur rattacher des états émotifs. C'est rassurant si un thérapeute peut simplement être avec moi lorsqu'il n'y a pas de réponses. Parfois, il n'y a pas de mots et être juste silencieux m'aide à accéder à mon moi intégré. »
Pour les 6, lâcher leurs défenses mentales assez longtemps pour ressentir leurs émotions demande du courage. Les thérapeutes peuvent les guider sur ce territoire peu familier : « Une fois que j'ai entamé un travail sérieux, en profondeur, les leçons devaient passer par l'expérience. Comme on dit souvent, “la seule issue possible est de passer à travers” et ça semble particulièrement vrai pour les 6. Le besoin d'inclure un travail sur le corps et une connexion au cœur est énorme.
« Ma plus grande peur était de perdre ma finesse d'esprit. J'avais des visions où je devenais un “surfeur blond”. Au final, j'ai effectivement perdu un peu de finesse d'esprit, mais j'y ai gagné un cœur. Je ne reviendrai en arrière pour rien au monde. Je devais aussi trouver une voie vers la foi. L'absence de confiance s'appliquait à toutes mes relations, y compris spirituelles. Une fois ce pas franchi, j'ai trouvé ma propre autorité. » Une autre 6 ajoute : « La Gestalt-thérapie, en particulier, m'a été spécialement utile pour me sortir de ma tête. »
Il est également utile que les thérapeutes encouragent les 6 à être honnêtes à propos de ce qu'ils veulent, et de travailler sur toutes les peurs que cette acceptation peut produire. Le thérapeute peut guider le 6 à être présent aux indications données par le corps pendant qu'il imagine visuellement différents scénarios et leurs résultats, y compris ce qui pourrait arriver si le 6 poursuivait et obtenait ce qu'il veut.
Re-raconter les histoires
Une technique appelée « re-raconter une histoire », développée par le linguiste Michael White, est particulièrement utile aux 6 qui doutent ou se reprochent des choses de manière infondée. Cette approche, faisant partie de la thérapie narrative, dit que la réalité que nous vivons est fondée sur des histoires que l'on se raconte à soi-même et qu'en changeant nos histoires, nous pouvons changer notre réalité. Un thérapeute “narratif” encourage généralement les clients à chercher dans leur histoire leurs forces personnelles. Il aide le client à accumuler des informations qui contredisent son histoire de “moi problématique” et de re-raconter son histoire d'une manière qui le rende plus fort. Cela peut être particulièrement utile pour les survivants d'un traumatisme qui ont tendance à culpabiliser et sont souvent injustement accusés par les autres aussi. Les gens faisant partie de la communauté du client sont utilisés de manière sélective pour aider à réécrire l'histoire du client. Le thérapeute joue le rôle du coach-avocat.
Une 6 raconte son expérience de cette technique dans les détails : « Ma conseillère psychologique spécialisée dans les violences sexuelles m'a expliqué que la thérapie narrative est fondée sur l'idée que nous avons tous plusieurs histoires différentes que nous pouvons raconter à propos de notre vie. La thérapie m'a aidée à reformuler les histoires de ma vie et à abandonner les histoires que je voyais à travers les yeux de mes agresseurs. L'histoire de mon premier viol était fondée sur la croyance que j'étais responsable de ce que mes agresseurs m'avaient fait. Je n'ai pas pris conscience de cela jusqu'à ce que je sois violée par le pasteur et que je commence à vivre suivant la même histoire avec lui aussi. Ma conseillère psychologique m'a aidée à voir comment mes premières histoires m'avaient amenée à appliquer cette vision à mon viol récent et comment elles avaient détruit mon image de moi-même. Je n'avais pas non plus réalisé à quel point mon viol dans l'enfance avait envahi tous les aspects de ma vie. Ma conseillère en thérapie narrative m'a encouragé à regarder ma vie et à contacter les personnes que je savais avoir une vision différente de moi. En particulier, concernant le problème actuel de rétablissement après le viol à l'église, j'ai pu contacter de vieux amis hors de l'église et obtenir leur point de vue. J'étais étonnée d'entendre leur vision positive de moi et leur incrédulité vis-à-vis de l'histoire du pasteur envers moi. Un ami de mon mari en particulier a dit “je ne peux pas croire que la Jackie que je connais puisse avoir l'intention de ‘séduire' qui que ce soit.” Ça m'a aidé à reconstruire ma propre vision de moi-même et de ma vie.
« Il était aussi intéressant de noter que mes amis hors de l'église étaient plus préoccupés par le comportement du pasteur envers moi alors que les gens de l'église ont fait des commentaires sur le comportement que j'avais perçu. Par conséquent, j'ai pu regarder mon histoire de manière plus positive, voir la petite fille que j'étais et entrer plus en contact avec sa bonté, voir les dommages que mes agresseurs ont faits à ma vie et avoir un contact avec ceux et celles qui me soutiennent. Dans les mauvais moments, j'essaie de me rappeler comment ma conseillère abordait mes histoires et j'essaie de reformuler mes pensées. »
La thérapie narrative peut aider les 6 à désamorcer leur tendance à reformuler négativement en apprenant à reformuler positivement comme le font les 7. Si le 6 a été blessé par une autorité, le thérapeute peut faire appel à la capacité de cet ennéatype à remettre l'autorité en question et l'utiliser à bon escient ; aidant le 6 à identifier à quel point il a été blessé ou traité injustement. Re-raconter ses histoires donne un nouveau pouvoir au 6, l'aidant à développer encore plus son autorité intérieure.
Les points de connexion
Les points de connexion en 9 et en 3 aident tous deux les 6 à se fonder sur leurs émotions et à s'orienter de manière réaliste vers le monde extérieur.
Du 6 vers le 9
Une intégration en 9 aide les 6 à entrer et rester dans leur corps ; ils racontent parfois que c'est une sensation de détente corporelle plus souvent ressentie en vacances. Plusieurs exemples de cet article illustrent les bienfaits de cette connexion ; elle aide les 6 à accéder plus facilement à des émotions comme la tristesse ou l'amour. Cela les aide aussi à apprécier les meilleures intentions des autres. Lorsque les 6 ont un sens développé de leur corps, ils peuvent distinguer l'intuition et la paranoïa plus efficacement.
En désintégration, les 6 dans un état égotique de 9 évitent souvent de donner leurs opinions ou de prendre position si cela peut mener à un conflit avec les autres. Ils peuvent ne pas savoir ce qu'ils veulent vraiment et être focalisés sur l'examen minutieux ou l'apaisement des autres. Faire cela leur coûte, mais ils peuvent accuser des figures d'autorité, des circonstances extérieures ou la malchance. Se perdre dans des détails sans importance tout en procrastinant est aussi un aspect négatif de cette connexion. Les 6 peuvent aussi aborder les conflits avec le côté passif-agressif du 9.
Du 6 vers le 3
Une intégration en 3 aide les 6 à faire ce qu'ils désirent et leur apporte une confiance pleine d'optimisme qui les aide à atteindre leurs buts. La satisfaction de leurs désirs affectifs peut également les faire entrer en contact avec leurs émotions.
En désintégration, la connexion en 3 peut amener les 6 à trop travailler et s'épuiser. Ils peuvent également être fourbes et attachés à leur image. Certains 6 ont l'esprit de compétition, souvent d'une manière qui laisse les autres surpris et interloqués : « Je trouve des moyens de faire la compétition. Mentalement, je cherche un angle auquel j'ai droit. Je fais semblant de ne pas faire de compétition mais en réalité, je la fais en parallèle. » Comme les 1, les 6 peuvent aussi vouloir secrètement ce qu'ils dédaignent chez les autres.
Les rêves
Le rêve suivant a été rapporté par une 6 essayant de décider si elle devait ou non quitter son emploi. L'intensité du rêve et l'humour sont caractéristiques de la vie intérieure des 6 : « Il y a de cela plusieurs années, je m'interrogeais (et m'interrogeais, et m'interrogeais) sur le fait de quitter ou non mon emploi en entreprise. Même si ce job me rendait dingue et même si j'avais besoin d'une pause, ça me faisait trop peur de partir comme ça et d'être soudainement au chômage. J'attendais qu'ils m'offrent un parachute doré pour que je puisse partir avec de l'argent en poche, un petit matelas sur lequel atterrir. Ça me semblait comme sauter d'une falaise, même si un ami m'avait dit “regarde bien la falaise, elle n'est haute que de 30 centimètres”.
« Pendant cette période, j'ai fait un rêve où il y avait des gens de mon bureau. Nous travaillions tous sur un projet qui avait une date de livraison (comme dans la vraie vie). Je courrais en essayant d'obtenir tous les détails (comme dans la vraie vie) et me sentant très nerveuse. Je cherchais une personne en particulier pour qu'elle me donne des informations, et on me disait qu'elle était à tel endroit. Quand j'y suis arrivée, il y avait une file d'attente, et j'ai automatiquement fait la queue. Ça avançait lentement, et lorsque j'étais plus près, je me suis rendu compte qu'il y avait une potence et que tout le monde faisait la queue en attendant d'être pendu. J'ai démissionné. »
Une thérapie acceptable
Cela demande aux 6 du courage pour vivre dans le présent alors que leur esprit est occupé à les alerter des désastres à venir. La thérapie peut fournir un endroit sûr où les 6 peuvent explorer leurs désirs et accéder de manière réaliste à leurs peurs. Leurs blessures d'enfance concernant l'autorité ont besoin d'être reconnues et comprises. Un client 6 peut vouloir que le thérapeute écoute ses fantasmes négatifs concernant le futur. Mais, au final, le thérapeute aura besoin d'aider son client à s'ouvrir à l'étendue complète des possibilités, y compris ce que le 6 désire le plus.
Les 6 ont aussi besoin d'aide pour reconnaître leur influence sur les autres. En se fondant plus dans leur corps et leurs émotions, ils peuvent mieux distinguer leurs intuitions et leurs projections. En étant une « figure d'autorité » digne de confiance et légitimement compétente, le thérapeute peut présenter au client 6 un modèle lui montrant comment se réapproprier sa propre autorité et comment vraiment s'individuer.
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Cet article est extrait de The Enneagram Field Guide de Carolyn Bartlett. Pour plus d'articles et d'informations ou pour la contacter, voir insightforchange.com
© Copyright Carolyn Bartlett et Enneagram Monthly, 2007. Tous droits réservés dans le monde entier.
© Copyright Institut Français de l'Ennéagramme® pour la traduction française, Paris, 2008. Tous droits réservés dans le monde entier.
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