Scroll To Top

Frankie et Johnny
Analyse

Frankie (Michelle Pfeiffer) : 6

Le personnage de Frankie est dominé par la peur. Cette peur n’est pas uniquement due au traumatisme qu’elle a subi ; elle est plus profonde et plus existentielle que cela. Frankie a peur de tout et de son contraire :

  Johnny : Tu n’as plus à avoir peur.
  Frankie : J’ai peur. Je meurs de peur. J’ai peur de me retrouver toute seule, j’ai peur de ne pas être seule. J’ai peur de ce que je suis, de ce que je ne suis pas, j’ai peur de ce que je pourrai devenir, peur de ce que je ne deviendrai jamais. Je ne vais pas continuer à être serveuse pendant tout le temps qu’il me reste à vivre, mais j’ai peur de quitter ce travail. Je me sens fatiguée. Tu peux pas savoir ce que je suis fatiguée d’avoir peur.

Cette peur se manifeste tout au long du film. La première fois où elle fait l’amour avec Johnny, elle a des gestes de la main pour se protéger. Quand elle fait tomber ses paquets de commission dans la rue et qu’un passant veut l’aider, elle pousse un cri de frayeur. Mais surtout, Frankie se protège par des questions. Perpétuellement dans le doute, il lui faut savoir le pourquoi des attitudes des gens. D’où des questions étranges : "Pourquoi voulez-vous sortir avec moi ? […] Je ne plaisante pas. Je veux savoir pourquoi vous voulez tant sortir avec moi." Et des dialogues surréalistes :

  Johnny : Ouvre ta robe de chambre.
  Frankie : Non, je n’ai pas envie d’ouvrir ma robe de chambre. Pourquoi ?
  Johnny : J’en sais rien. J’ai envie de te regarder.
  Frankie : Non.
  Johnny : Même quinze secondes. J’ai envie de te regarder.
  Frankie : Regarder quoi ? Pourquoi ?

ou

  Frankie : Faut vraiment qu’on fasse cela ce soir ?
  Johnny : Oui.
  Frankie : Qui dit cela ?

La peur pousse sans cesse Frankie à l’agressivité : "Qui vous a dit de toucher à ma carte de pointage ? Je vous interdis de toucher à ma carte de pointage." Elle perçoit tout intérêt comme une intrusion :

  Johnny : Quel âge avez-vous ?
  Frankie : De quoi je me mêle ?

Elle soupçonne Johnny de tout ou de rien. Quand il cherche un pansement dans son armoire à pharmacie parce qu’elle s’est coupée, elle angoisse tout de suite : "Qu’est-ce que tu trafiques là-dedans ? […] Qu’est-ce que tu fais ?"

En bon 6, son goût pour le mental lui fait parfois tenir des raisonnements bizarres : "Si je voulais un homme dans ma vie, pourquoi est-ce que je me serais payé une vidéo ?"

Frankie sait comment il faut se tenir. Elle est choquée par l’attitude de ses collègues à l’hôpital ("Chut !") ou à l’église ("Mesdames !"). Elle est indignée que Johnny lui propose de sortir alors qu’ils sont en train de s’occuper d’un client atteint d’une crise d’épilepsie ("Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre !").

Frankie manifeste aussi les qualités de solidarité du 6. Elle est chaleureuse avec ses collègues et ses clients. Elle est indulgente pour les fautes des autres (le collègue qui lui a volé ses pourboires).

Identification avancée : Frankie est un 6 α de sous-type conservation ("Cordialité").

Frankie et Johnny : JohnnyJohnny (Al Pacino) : 7

Johnny est un mental, content d’apprendre et fier de savoir. Il regarde à la télévision les jeux "culturels", style Question pour un Champion, et il estime que tout le monde devrait avoir la même culture que lui : "Qu’est-ce qu’on t’a appris au lycée ? Tu devrais le savoir." lance-t-il aux candidats. "Tous les matins en se rasant, [il] regarde un mot nouveau" dans le dictionnaire et il se débrouille pour le placer dans la journée, voire pour l’expliquer à Frankie ou à ses collègues de travail qui n’en espèrent pas tant. Les mêmes ont droit régulièrement à des extraits de Shakespeare dont ils ne sont pas plus demandeurs. Frankie a toujours "lu quelque part" une information utile (le sens de rangement des bibelots en forme d’éléphant) et quand il est confronté à quelque chose de nouveau pour lui (le couple de voisins homosexuels de Frankie), il trouve cela "intéressant". Il admire Monsieur Mémoire qui "a des livres entiers dans la tête."

Johnny croit à la force de conviction du mental. Il discute toujours : "Attends ! On va parler. Tu veux ?" Il a toujours une idée pour se défendre :

  Frankie : Vous savez quelques fois vous pouvez être vraiment odieux.
  Johnny : Je suis pas odieux. J’ai juste envie de sortir avec vous.

ou pour obtenir ce qu’il veut :

  Frankie : Je ne peux pas en avoir ! [des enfants]
  Johnny : On en adoptera.

Johnny cherche à plaire. Dans la cuisine ou lors de la soirée, il frime. Il est plutôt content de lui. Frankie l’a tout de suite repéré : "Il se croit très malin." Il supporte mal d’être repoussé ou critiqué. Ce sont des moments où il peut être méchant et bien évidemment, il le fait en s’appuyant sur sa supériorité mentale :

  Johnny : Il faut que je t’explique "affinités".
  Frankie : Tu sais, c’est la première chose vraiment minable que tu m’aies jamais dite. Se moquer de l’intelligence de quelqu’un ou de ses connaissances ou de son ignorance, c’est la mentalité d’un type avec qui je ne veux rien avoir à faire. […] Je savais pas que t’étais cruel.

Johnny est toujours prêt à faire de l’humour. Lorsque Frankie lui fait recuire un plat d’œufs pour un client qui les aime baveux, il répète ainsi la commande : "Allez ! Un œuf cru ! Ça marche !". Quand le client épileptique se réveille de sa crise et lui demande ce qui s’est passé, il rétorque : "Je me suis fait envoyer sur les roses." À la soirée, Frankie refuse de danser avec lui et le pousse à le faire avec Nedda ; il lui dit alors : "S’il se passe quelque chose entre nous, vous n’irez pas… ?" Au bowling, pour détendre l’atmosphère, il joue avec sa "mini-boule".

Cet humour est parfois une défense et parfois aussi le signe d’une vraie gaieté. Johnny chante souvent dès qu’il lui arrive quelque chose d’agréable, trouver du boulot ou croire être aimé de Frankie. Comme presque tous les 7, il a du mal à accepter que cela ne soit pas toujours compris :

  Frankie : Quand tu parles, je ne sais jamais si c’est pour blaguer ou si tu es sérieux.
  Johnny : Les deux en même temps. Je fais des blagues sérieuses.

L’incapacité des autres à prendre la vie légèrement l’étonne : "Dire que ça devrait être tellement simple. Pourquoi faut-il que ce soit toujours la croix et la bannière ?" Pour lui, quand on est bien, "c’est pas la peine d’aller chercher plus loin." C’est même là une source d’incompréhension majeure avec l’inquiète Frankie qui y voit une sorte d’égoïsme et lui reproche : "Tout le monde ne prend pas la vie comme un pique-nique. […] Les gens comme toi sont tellement occupés à dire ce qu’ils veulent ou ce qu’ils ressentent que c’est à peine si vous remarquez que nous autres, on est pas exactement en train de grimper aux rideaux en chantant Y a de la Joie !"

Cela n’empêche pourtant pas Johnny d’être sensible, qu’il s’agisse de Frankie bien sûr ou de ses enfants ou de la mort de la serveuse du restaurant qui lui rappelle sa mère.

Mais ce goût de la légèreté, ce sens de l’humour en font quelqu’un d’un peu enfantin. Quand il doit renoncer à faire l’amour avec Frankie parce qu’ils n’ont pas de préservatifs, il est boudeur : "Je t’ai respecté et je suis pénalisé !" Il a fait un faux chèque, mais appelle cela "un faux mouvement". Les jeux d’enfants apparaissent souvent dans son vocabulaire. Il essaye de deviner le numéro de l’appartement de Frankie : "6B ? 3F ? Je brûle ?" Il jure "croix de bois, croix de fer" qu’il a bien divorcé il y a trois ans. Quand Frankie lui montre la cicatrice laissée par les coups de boucle de ceinture que lui donnait son précédent amant, il embrasse la marque et :

  Johnny : C’est parti.
  Frankie : Ça ne partira jamais.
  Johnny : C’est parti. Je l’ai vu partir.

Identification avancée : Johnny est un 7 μ à aile 6.

Autres

D’autres personnages peuvent être étudiés à l’aide de l’Ennéagramme :

Tim (joué par Nathan Lane), le voisin homosexuel de Frankie, est un 2.

Nick (joué par Hector Elizondo), le propriétaire du restaurant où travaillent Frankie et Johnny, est un 2.

Retour à la
description du film