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Lonesome Jim
Analyse

Lonesome Jim : JimJim Roush (Casey Affleck) : 4

Jim est l’archétype du 4 désintégré.

À simplement le voir, la fixation de mélancolie saute aux yeux. Jim en est bien sûr parfaitement conscient :

  Anika : Tu vis chez tes parents ?
  Jim : Temporairement. Je partirai quand mon frère sera rétabli. Je revenais pour faire une dépression, mais cet enfoiré m’a grillé.
  Anika : Qu’est-ce que t’as ?
  Jim : Désespoir chronique.
  Anika : [Elle hoche la tête.]

Mais cette mélancolie, il la cultive soigneusement :

  Anika : [À propos des photos collées sur le mur de la chambre de Jim.] Qui sont tous ces gens ?
  Jim : Euh… Des écrivains.
  Anika : Ah bon ?
  Jim : Voici Virginia Wolf. En dessous, Richard Yates, un de mes préférés.
  Anika : Il a écrit quoi ?
  Jim : Des histoires tristes sur des gens tristes, voire pathétiques. À sa mort, tous ses livres étaient épuisés. Et bien sûr, Poe, Plath, et Burroughs. Celui-là s’appelle Breece D. Pancake. Ensuite Dorothy Parker. La grande, c’est Hemingway.
  Anika : Ah oui, j’en ai lu au lycée. Bon écrivain.
  Jim : Qu’est-ce qui t’a plu chez lui ?
  Anika : Ça le faisait bander d’écrire. Tu vois ?
  Jim : [Long silence.] Oui.
  Anika : Ses histoires étaient moins coincées et fabriquées. Plus réelles.
  Jim : C’était un réaliste.
  Anika : C’est pour ça…
  Jim : Il s’est fait sauter le caisson.
  Anika : Dis donc…
  Jim : Comme Pancake. [Il montre une à une les photographies.] Celui-là s’est jeté d’un pont. Elle s’est mis la tête dans un four. Et ces trois-là, c’est l’alcool qui les a tués.

Toute tentative d’y échapper lui semble vaine :

  Anika : [Elle a apporté un cadeau.] Un sourire pour ce pauvre Hemingway.
  Jim : Il y a un truc qui va pas.
  Anika : Normal, t’as l’habitude de le voir autrement.
  Jim : Autrement, c’est réaliste.
  Anika : Autrement, c’est déprimant.
  Jim : C’est ce que je disais.
  Anika : Oh Jim !

Tout est tragique dans la vie de Jim, et style de communication du type oblige, il l’exprime en permanence. Dans le même registre, il ponctue ses phrases de longs silences et d’innombrables "Euh…" que nous n’avons pas tous retranscrits.

La seule solution est de découper sa vie en deux, le monde réel et déprimant dans lequel il faut exercer un métier alimentaire d’une part, et une activité mettant en œuvre l’orientation du type et son mécanisme de défense de sublimation :

  Anika : Vous faisiez quoi là-bas ?
  Jim : Je promenais des chiens. Pour gagner ma vie, je veux dire. Mais j’écris aussi.

Le 4 a le centre émotionnel dirigé vers l’intérieur. Quand il va aussi mal que Jim, il est tellement centré sur ses propres émotions que cela le rend insensible et égoïste. Jim montre cela pendant la quasi-totalité du film, notamment avec sa famille. Ainsi, il pousse son frère Tim au suicide :

  Jim : Je suis malheureux où que je sois.
  Tim : Moi aussi.
  Jim : Je ne sais pas ce que je fais là. Sur cette Terre, dans cette vie. T’as la réponse, toi ?
  Tim : Non.
  Jim : [Soupir.] Il n’y a pas de réponse. Pour le bien du monde, les gens comme moi devraient pas exister.
  Tim : Je suis vraiment malheureux.
  Jim : Je sais. À ta place, je sais pas si j’y arriverais.
  Tim : À quoi ?
  Jim : À continuer. Moi qui voulais en finir, si en plus, j’avais ta vie… [Soupir.]
  Tim : Pourquoi ?
  Jim : Divorcé. Un job merdique dans une scierie après s’être fait jeter de la police de Cromwell… Tu voulais être dans la CIA… Franchement, t’es loin du compte. Tu vis avec papa maman pour qu’ils s’occupent des gosses. Tu gagnes à peine plus que le SMIC à 32 balais ! Je suis peut-être un raté, mais toi, t’es une tragédie !
  Tim : Oui.

Il exploite sa mère (les spécialistes remarqueront au passage le contrepoids égotique du 4) :

  Jim : Je peux prendre la voiture ?
  Sally : Bien sûr. Tu as besoin d’argent ?
  Jim : Oui, comme ça, je ferai le plein.
  Sally : C’est déjà fait.
  Jim : D’accord.
  Sally : [Elle lui tend les clés de la voiture.] Tiens.
  Jim : J’en veux bien un peu quand même.
  Sally : C’est ce que je gagne en vendant des snacks au travail. [Elle lui donne quelques billets.]
  Jim : [Il regarde quelle somme elle lui a donnée.] Merci.
  Sally : De rien. [Pendant qu’elle se retourne, Jim prend quelques billets supplémentaires dans son sac.]

C’est au point de lui refuser la moindre aide, à elle qui pourtant n’en demande pas souvent :

  Sally : Oh Jimmy ! Tu peux surveiller les filles pendant que je fais les courses ?
  Jim : Euh… Désolé, j’ai un truc à faire.
  Sally : Oh ! OK. C’est OK.
  Jim : Tu nous laissais seuls, Tim et moi. Je peux prendre la voiture ?
  Sally : Bien sûr, mon chéri. Tu n’auras qu’à me déposer au magasin.
  Jim : À vrai dire, euh… Je vais pas dans ce coin-là.
  Sally : Oh ! Ça ne fait rien.
  Jim : Je te dépose au bout de l’allée. [Comprendre au bout de l’allée qui va du garage à la sortie de la pelouse qui entoure la maison !]
  Sally : Non, je vais marcher. Ça me fera du bien.
  Jim : Merci, m’man.

Quand sa mère se retrouve en prison, Jim lui amène un livre, un livre qui lui plaît parce qu’il parle de "l’amour vain d’un homme impuissant", et dont il est évident qu’il ne l’intéressera pas.

Il n’est d’ailleurs pas plus attaché à son père :

  Sally : Jim, comment on a fait pour vous rendre si malheureux ?
  Jim : Je sais pas.
  Sally : Réfléchis. Sois franc. Tu es intelligent et sensible. Tu as bien une opinion.
  Jim : Y a des gens qui devraient pas avoir d’enfants.

Vivre avec sa famille ne fait bien sûr qu’aggraver le problème, résultat du mécanisme d’attention du 4 qui lui fait voir tout ce qui est laid dans la situation présente :

  Jim : Pour tout dire, je n’aime pas tellement ma famille.
  Anika : C’est horrible de dire ça.
  Jim : C’est vrai, je les aime énormément, mais je ne supporte pas d’être si près d’eux.
  Anika : À quoi bon ce genre d’amour ?

Il entraîne, paraît-il, l’équipe de basket des Ladders, mais ne se souvient pas du nom des enfants qui y participent : "Ben, voici Rachel, Sarah, euh… et le reste de l’équipe."

Jusqu’à la fin, il ne se rend pas compte que sa vie consiste à "beaucoup demander et si peu donner". Il est fier de sa richesse émotionnelle ("Sois gentil avec ta mère, et promets-moi de ne pas devenir insensible. En tout cas pas avant l’adolescence."). Ceci mis à part, il a une image désastreuse de lui-même : "Il devrait pas m’admirer", dit-il quand il apprend l’affection que Ben a pour lui.

Jim réprime le centre instinctif. Il "[se] sent bête quand [il]court". Il passe une grande partie de ses journées à dormir ou à ne rien faire, même décrocher le téléphone. Quand il entraîne l’équipe de basket, ses consignes sont pour le moins minimalistes : "OK. Euh… Faites ce que vous voulez. Je ne sais pas quoi vous dire." Dans son cas, cette répression aggrave la désintégration. L’idée de travailler dans l’usine de ses parents (activité plus banalité) le révulse :

  Don : Tu peux nous aider ?
  Jim : Je vais m’occuper de l’équipe.
  Don : On aurait bien besoin de toi à l’usine. Ta mère vit tout ça très mal, et elle manquait déjà de personnel.
  Jim : Écoute. Euh… Euh… Je sais pas.
  Don : Quoi ? Tu le fais ou tu le fais pas.
  Jim : Alors on va dire que je le fais pas.

Quand il va voir son frère qui est dans le coma à l’hôpital et auquel il apporte un paquet de chips, il claque des doigts à ses oreilles en lui disant : "Va falloir se réveiller. L’équipe a besoin de toi. Et papa me fait bosser pour maman tant que t’as pas émergé. Allez… Pauvre con. Réveille-toi." On sent dans cette agressivité vis-à-vis de Tim une sorte de compétition inconsciente, expression de l’instinct sexuel, pour obtenir l’attention de la mère.

La passion d’envie n’est pas le mécanisme le plus visible du type, mais quand elle apparaît au détour d’une conversation avec Anika ("Il y a tellement de gens drôles et joyeux dans ce monde. Tu serais mieux avec l’un d’eux, non ?"), on comprend qu’elle est là en permanence.

Quand Anika lui reproche de ne pas assurer et qu’il craint qu’elle le quitte, il tente d’abord d’argumenter, puis préfère prendre les devants : "Je veux peut-être pas que vous veniez…" Anika le quitte et c’est le déclic qui va le faire changer. Il envoie le ballon de basket et… marque un panier, symbolisation de sa reconnexion à son centre réprimé.

Même si Jim garde une vision pessimiste du monde et de la vie ("Tu es une des rares bonnes pêches dans ce monde de fruits pourris."), la fin du film marque un énorme pas vers l’intégration. Jim perçoit la nécessité d’agir : "Mais je comprends aujourd’hui que c’était moi le naïf. Je pensais qu’en me résignant, je vivrais mieux que ceux qui essaient et échouent. Je m’en veux de ne le comprendre qu’aujourd’hui." Il choisit de voir le futur plutôt que de ressasser le passé : "Le passé n’annonce pas toujours l’avenir. Cette équipe nous a vus jouer avant, mais pas aujourd’hui." Il prend conscience qu’il doit diriger son émotionnel vers l’extérieur : "Je m’en veux […] de t’avoir beaucoup demandé et si peu donné."

Jim est un 4 α de sous-type social ("Honte") à aile 5.

Lonesome Jim : SallySally Roush (Mary Kay Place) : 2

Sally n’est qu’amour pour ses enfants. Le retour de Jim est accueilli avec des cris de joie : "Je suis si contente de te revoir. Tu lui manques tellement à ta maman." Là est le problème. Elle ne se définit que comme une maman. Elle ne peut pas comprendre que, aussi immatures soient-ils, ses fils sont des adultes :

  Sally : Maman est drôlement contente de te voir.
  Jim : Moi aussi, m’man.
  Sally : Tu téléphones si peu… Je m’inquiète pour mon petit garçon seul dans la grande ville.
  Jim : Je ne suis pas un petit garçon.
  Sally : Si tu l’es. Et un joli petit garçon. Mon joli petit garçon… [Elle l’étreint.]

Quand Tim est à l’hôpital, immobilisé par de multiples fractures, elle peut le nourrir à la becquée et se régale : "Tu es le bébé de ta maman. Tu es mon grand bébé."

Cela la rend particulièrement intrusive. Elle rentre dans la salle de bains alors que Jim est nu dans la baignoire, et met sa main dans l’eau pour vérifier la température. La présence d’étrangers ne l’arrête pas. Elle dit à Anika : "Jim est mon joli petit garçon." Au cours du repas qui suit, elle trouve utile de lui parler de la taille du sexe de Tim et de sa difficulté à utiliser l’urinal.

Sally accepte évidemment toute demande d’aide et propose spontanément la sienne, tout en en faisant néanmoins sentir l’importance :

  Jim : Je peux prendre la voiture ?
  Sally : Bien sûr. Tu as besoin d’argent ?
  Jim : Oui, comme ça, je ferai le plein.
  Sally : C’est déjà fait.
  Jim : D’accord.
  Sally : [Elle lui tend les clés de la voiture.] Tiens.
  Jim : J’en veux bien un peu quand même.
  Sally : C’est ce que je gagne en vendant des snacks au travail. [Elle lui donne quelques billets.]
  Jim : [Il regarde quelle somme elle lui a donnée.] Merci.
  Sally : De rien.

Les rares fois où elle exprime une quelconque demande, elle ne s’offusque pas que celle-ci soit refusée :

  Sally : Oh Jimmy ! Tu peux surveiller les filles pendant que je fais les courses ?
  Jim : Euh… Désolé, j’ai un truc à faire.
  Sally : Oh ! OK. C’est OK.
  Jim : Tu nous laissais seuls, Tim et moi. Je peux prendre la voiture ?
  Sally : Bien sûr, mon chéri. Tu n’auras qu’à me déposer au magasin.
  Jim : À vrai dire, euh… Je vais pas dans ce coin-là.
  Sally : Oh ! Ça ne fait rien.
  Jim : Je te dépose au bout de l’allée. [Comprendre au bout de l’allée qui va du garage à la sortie de la pelouse qui entoure la maison !]
  Sally : Non, je vais marcher. Ça me fera du bien.
  Jim : Merci, m’man.

Quand, au parloir de la prison, Jim lui a amené un livre qui ne tient absolument pas compte de ses goûts, elle se contente de dire : "Oh ! Formidable ! Merci beaucoup mon trésor."

Cela arrive assez souvent aux 2 peu intégrés. Ils ont tellement donné à leur entourage une habitude de disponibilité, que leurs proches n’imaginent même plus qu’ils peuvent avoir besoin d’une vie personnelle :

  Jim : J’ai besoin d’être seul.
  Sally : Je comprends. Parfois, maman aussi aimerait être seule.
  Jim : Quoi ?
  Sally : Rien. Je plaisantais. [Rire nerveux.]

Pourtant, Sally en demande peu. Le plus petit compliment la remplit de joie : elle s’éclaire quand Jim dit de son petit-déjeuner qu’il est "super bon".

Sally est indulgente avec ceux qu’elle aime. Elle accepte l’inactivité de Jim : "Prends ton temps, trésor. Tu trouveras bien ta voie." Elle n’hésite pas à recourir à la fixation de flatterie : "Tu es un excellent entraîneur."

Le fait d’avoir deux fils désintégrés et dépressifs est pour elle un crève-cœur :

  Sally : Jim, comment on a fait pour vous rendre si malheureux ?
  Jim : Je sais pas.
  Sally : Réfléchis. Sois franc. Tu es intelligent et sensible. Tu as bien une opinion.
  Jim : Y a des gens qui devraient pas avoir d’enfants. [Le visage de Sally se décompose.] Enfin, je dis ça comme ça.
  Sally : Oh ! [Elle essaye de sourire.]
  Jim : Écoute…
  Sally : Non, ça va. [Elle rit nerveusement, se lève et cherche un prétexte pour s’enfuir.] Un peu fatiguée. Bonne nuit, mon mignon.

Recours fréquent chez les 2 quand leur aide n’est pas appréciée à sa juste valeur dans leur famille, Sally va trouver le moyen de donner son amour à l’extérieur, grâce à son cours séjour en prison :

  Jim : M’man ! T’es rentrée ?
  Sally : Oui.
  Jim : Comment ?
  Sally : Ça s’appelle une liberté sous caution. Une des filles en prison m’en a parlé. Apparemment, ton père n’a pas compris que c’était une des possibilités. [Don qui lisait son journal se lève et quitte la pièce sans un mot.] J’ai appelé un garant très gentil à Kendalville qui a réuni l’argent pour moi.
  Jim : Super. [Il va pour prendre un morceau d’un gâteau que Sally vient visiblement de faire.]
  Sally : Oh chéri, n’y touche pas. C’est pour Kiki.
  Jim : Qui est Kiki ?
  Sally : La détenue qui m’a donné le numéro du garant. Je vais apporter des gâteaux à toutes mes copines de la prison. Elles ont été adorables avec moi. Difficile de croire que ce sont des criminelles.

On aura noté au passage qu’elle dit ainsi pour la première fois non à Jim, et l’utilisation du mécanisme de défense de répression.

Identification avancée : Sally est un 2 α de sous-type conservation ("Privilège").

Lonesome Jim : AnikaAnika (Liv Tyler) : 2

Il est intéressant de comparer les personnages d’Anika et de Sally, toutes deux 2 α, et dont les différences s’expliquent par le sous-type sexuel chez Anika et conservation chez Sally.

On trouve chez Anika, dès sa première apparition, la confusion classique chez le 2 sexuel désintégré entre relations émotionnelles et relations sexuelles. Jim l’aborde dans un bar où elle passe une soirée avec des collègues :

  Jim : Hey ! Simple curiosité… Pourquoi ces blouses ?
  Anika : On est infirmières.
  Jim : Je vivais en face d’un hôpital à Manhattan.
  Anika : [Elle hoche la tête.]
  Jim : Manhattan… New York.
  Anika : [Pas impressionnée.] Mmm. Mmm.
  Jim : Vous y êtes allée ?
  Anika : [Elle secoue négativement la tête.]
  Jim : C’est… pas mal.
  Anika : Vous faisiez quoi là-bas ?
  Jim : Je promenais des chiens. Pour gagner ma vie, je veux dire. Mais j’écris aussi.
  Anika : C’est vrai ? Moi aussi.
  Jim : Ah bon ?
  Anika : Enfin pour moi.
  Jim : J’aime bien ton public !

Ce petit compliment et la découverte qu’il a travaillé dans la chaîne de restaurant Applebee’s qu’elle "adooore" seront suffisants pour qu’elle l’informe que "les lits d’hôpital sont plus confortables que les autres" et qu’elle l’y emmène faire l’amour, laissant en plan ses collègues.

Tim est tout de suite conscient de cet aspect de sa personnalité :

  Tim : Elle est super-sexe.
  Jim : Tu trouves ?
  Jim : Oui. Tu couches avec ?
  Jim : Euh… Oui.
  Tim : C’est génial.
  Jim : Merci.
  Tim : Je parlais pour moi. Ça veut dire qu’elle est pas difficile. Elle couchera aussi avec moi.

Certes, Anika manifeste le besoin traditionnel d’aider propre au 2 : "Écoute, Jim, j’aime aider les gens." Cela la conduit à prendre soin de Tim, alors qu’il n’est pas hospitalisé dans son service : "Appelle-moi si t’as besoin de quelque chose." Mais évidemment, la dimension sexuelle du personnage donne à tout cela une ambiguïté qui déclenche la jalousie de Jim :

  Jim : Excuse-moi, qu’est-ce tu fais là, au juste ?
  Anika : Je voulais aider ton frère à s’installer.
  Jim : C’est l’hosto qui t’envoie ?
  Anika : Non. Je voulais te rendre service.
  Jim : Je vois le genre, merci.

Anika exprime en permanence un pathétique besoin de reconnaissance. Le moindre compliment provoque chez elle une joie hors de toute mesure. Nous avons déjà cité celui de la rencontre avec Jim et ses conséquences :

  Jim : Je promenais des chiens. Pour gagner ma vie, je veux dire. Mais j’écris aussi.
  Anika : C’est vrai ? Moi aussi.
  Jim : Ah bon ?
  Anika : Enfin pour moi.
  Jim : J’aime bien ton public !

Anika rayonne à tous les signes d’attention, comme ici dans la chambre de Jim :

  Jim : Tu sens bon.
  Anika : [Son visage s’éclaire.] Merci.

Ou plus tard dans le gymnase :

  Anika : Alors, tu t’en fiches de tes nièces. Et de Ben. Et des gamins qu’il y a ici. Comme de moi, je suppose.
  Jim : Au contraire. Je vous trouve tous super.
  Anika : [Elle le regarde, extasiée.]
  Jim : Quoi ?
  Anika : Tu me trouves super ?
  Jim : Ben oui.
  Anika : Moi, je te trouve super.
  Jim : Il y a tellement de gens drôles et joyeux dans ce monde. Tu serais mieux avec l’un d’eux, non ? Quelqu’un qui te ressemble.
  Anika : [De plus en plus extasiée.]Tu me trouves drôle et joyeuse ?
  Jim : Évidemment.
  Anika : [Totalement ravie.] Tu peux pas t’empêcher de me complimenter.
  Jim : Tu m’as mal compris.
  Anika : Pas du tout. J’ai très bien compris.

On remarquera au passage la fixation de flatterie, Jim n’ayant vraiment pas grand-chose de "super" à ce moment du film. La composante dédain de la fixation apparaît lorsque Jim s’inquiète des réactions possibles du père de Benjamin qu’elle lui a décrit comme férocement jaloux : "Il sera pas jaloux de toi."

Le seul reproche qu’elle fait à Jim concerne évidemment son incapacité à aimer les gens. Quand elle découvre qu’il néglige l’entraînement de l’équipe de basket, elle s’interroge : "Alors, tu t’en fiches de tes nièces. Et de Ben. Et des gamins qu’il y a ici. Comme de moi, je suppose." Émotionnel dirigé vers l’extérieur, elle comprend difficilement le fonctionnement de Jim :

  Jim : Pour tout dire, je n’aime pas tellement ma famille.
  Anika : C’est horrible de dire ça.
  Jim : C’est vrai, je les aime énormément, mais je ne supporte pas d’être si près d’eux.
  Anika : À quoi bon ce genre d’amour ?

Identification avancée : Anika est un 2 α de sous-type sexuel ("Séduction agressive").

Lonesome Jim : DonDon Roush (Seymour Cassel) : 9

L’effacement caractérise le personnage de Don. Il arbore presque en permanence un sourire complaisant destiné à éviter le conflit avec sa femme ou ses fils. Parfois, il fait une petite tentative pour ramener Sally à la réalité, mais sans un mot plus haut que l’autre :

  Sally : [S’adressant à Jim.] Prends ton temps, trésor. Tu trouveras bien ta voie.
  Don : [Tout doucement.] Pas trop de temps quand même, il a presque trente ans.

Ou :

  Don : Pourquoi t’as mis une assiette, Sally ?
  Sally : Je voulais mettre le couvert de Tim, qu’il sache qu’on pense à lui.
  Don : [Doucement et calmement] Nom de Dieu, il est pas mort.

Derrière ce calme apparent, on sent la colère refoulée de Don :

  Sally : [À Tim hospitalisé.] Tu es le bébé de ta maman. Tu es mon grand bébé.
  Don : [Tout doucement.] Bon Dieu…

Le plus souvent, il l’exprime ainsi pour lui-même, ou bien il fuit plutôt que de prendre le risque du conflit :

  Jim : M’man ! T’es rentrée ?
  Sally : Oui.
  Jim : Comment ?
  Sally : Ça s’appelle une liberté sous caution. Une des filles en prison m’en a parlé. Apparemment, ton père n’a pas compris que c’était une des possibilités. [Don qui lisait son journal se lève et quitte la pièce sans un mot.] J’ai appelé un garant très gentil à Kendalville qui a réuni l’argent pour moi.

Si par hasard la colère sort, elle est d’une étonnante brièveté dans le but de ne pas provoquer une réaction de Sally :

  Don : Tu peux nous aider ?
  Jim : Je vais m’occuper de l’équipe.
  Don : On aurait bien besoin de toi à l’usine. Ta mère vit tout ça très mal, et elle manquait déjà de personnel.
  Jim : Écoute. Euh… Euh… Je sais pas.
  Don : Quoi ? Tu le fais ou tu le fais pas.
  Jim : Alors on va dire que je le fais pas.
  Don : [Il tape du poing sur la table.] Oui. Tu vas le faire, bordel. [Sally revient dans la pièce, et Don reprend immédiatement son visage souriant habituel.] T’entends, Sally ?
  Sally : Quoi ?
  Don : Jim demande s’il peut bosser pour toi ?
  Sally : Oh. Je ne te crois pas.
  Jim : [Don regarde durement Jim.] Je t’assure, m’man.

Son impuissance s’exprime fortement lorsque Sally est arrêtée :

  Don : Sally a été arrêtée pour avoir utilisé Fedex afin d’envoyer de la drogue. Il y a sa signature sur une dizaine de colis qui sont partis d’ici.
  Jim : Tu plaisantes ?
  Don : Pas du tout. J’en ai l’air ?
  Jim : Peut-être…
  Don : Eh bien, non ! Je vais expliquer à ces têtes de nœud qu’il y a erreur sur la personne. Couvre-nous, ta mère et moi, pendant mon absence.
  Jim : D’accord.
  Evil : Pas de problème, Donny.
  Don : Si on te demande quelque chose, tu fais l’idiot. [Il se prend la tête dans les mains, accablé.]

Chez lui, son travail fini, Don se livre au mécanisme de défense de narcotisation : sieste, fauteuil relax, télévision, bière.

Identification avancée : Don est un 9 α de sous-type conservation ("Appétit") à aile 1.

Autres

D’autres personnages peuvent être étudiés à l’aide de l’Ennéagramme :

Tim Roush (joué par Kevin Corrigan) est un 9. Il est aussi désespéré que Jim, mais contrairement à lui ne sait pas nommer et raconter ses émotions :

  Jim : Je suis malheureux où que je sois.
  Tim : Moi aussi.
  Jim : Je ne sais pas ce que je fais là. Sur cette terre, dans cette vie. T’as la réponse, toi ?
  Tim : Non.
  Jim : [Soupir] Il n’y a pas de réponse. Pour le bien du monde, les gens comme moi devraient pas exister.
  Tim : Je suis vraiment malheureux.
  Jim : Je sais. À ta place, je sais pas si j’y arriverais.

Son accident semble lui servir de prétexte à une certaine agressivité vis-à-vis de son frère. On remarquera toutefois que cela n’aboutit jamais à un conflit.

Oncle Stacy, dit Evil (joué par Mark Boone Junior) est un 8. Il utilise la société de Don et Sally pour monter un trafic de drogue. Interdit de chéquier, ce n’est pas sa première expérience de la délinquance. Il est fier de ses capacités de contrôle : "Une bite, c’est comme un clebs : ça fait ce qu’on lui dit." Il ne supporte pas une certaine forme d’expression qu’il assimile, du moins on peut le supposer, à de la faiblesse : "Te fais pas refiler leurs chéquiers avec les chatons ou les coquillages dessus. Je ne supporte pas. Ça me fout en boule ! Ils sont nazes !" La moindre contrariété déclenche colère et menace : "Méfie-toi quand tu pointes le doigt vers quelqu’un. T’as trois doigts pointés vers toi et un pouce vers le ciel. […] Ça veut dire : est-ce que ta pisse est propre ?"

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