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Bons baisers d’Hollywood
Analyse

Bons baisers d'Hollywood : Doris MannDoris Mann (Shirley MacLaine) : 2

Doris est persuadée d’être pleine d’amour pour les autres et particulièrement pour sa fille :

  Doris : Chérie, si tu crois que je t’ai fait du mal, pardonne-moi. Tout ce que j’ai fait, c’était par amour pour toi. Il est possible que je me sois trompée. Se tromper, ça arrive à tout le monde.
  Suzanne : Est-ce qu’on pourrait arrêter les frais ?
  Doris : J’ai fait des erreurs, mais c’est humain.

Doris aimerait profondément aider Suzanne : "Tu sais, lors de ma dépression, j’étais à deux doigts de me suicider. Si je ne l’ai pas fait, c’est pour toi.", "Tu ne peux pas savoir ce que ça me fait de voir ce que tu endures. Si je pouvais, je prendrais ta place."

Le problème, c’est que l’amour de Doris est dominateur et intrusif et que Suzanne y répond par la rébellion : "Tu es dure. […] Tu es toujours en train de me juger.", "J’ai toujours essayé d’être une bonne mère pour toi et comme remerciements, j’avais droit à ta froideur et à tes grands airs supérieurs. Depuis que tu as 14 ans, tu es persuadée que sur le plan intellectuel, je ne t’arrive pas à la cheville.", "Chaque fois que je fais un geste vers toi, tu me repousses."

Pour un 2, ce rejet est une remise en cause de son identité qui ne peut qu’aboutir à une grave désintégration. Une scène est révélatrice à cet égard. Suzanne est à l’hôpital après son overdose, et Doris veut amener le linge de Suzanne pour le laver. Celle-ci refuse jusqu’à hurler : "Laisse ça !" Le non verbal de Doris montre alors l’intensité du choc qu’elle subit. Aussi peu sympathique que soit le personnage, il est difficile de ne pas ressentir alors de la compassion pour sa souffrance.

Quand un 2 ne peut se faire aimer des autres autant qu’il le souhaiterait, il a recours à la manipulation émotionnelle et à la culpabilisation. Sur ce point, Doris est experte, comme ici quand elle organise une soirée pour la sortie de Suzanne de l’hôpital :

  Suzanne : Tiens, on dirait qu’il y a une fête dans le quartier.
  Doris : Oui, je me suis dit que ça serait sympathique d’inviter quelques amis pour fêter ton retour.
  Suzanne : Oh maman, il faut que je me lève tôt demain. J’ai pas envie de voir des gens.
  Doris : Oh ben d’accord. Si tu veux, j’entre dans la maison et je dis à tout le monde de partir.

Elle fait beaucoup mieux en voiture avec Suzanne :

  Doris : Je ne veux pas t’alarmer, ma chérie, mais autant te préparer à la chose. Je ne voulais pas t’en parler avant parce que tu avais ta cure de désintoxication et tout ça, mais tu te souviens de mon hystérectomie ?
  Suzanne : Celle de l’an dernier ?
  Doris : Eh bien, ils ont trouvé des tumeurs.
  Suzanne : C’est vrai ?
  Doris : C’est ce qu’on appelle des fibromes.
  Suzanne : Oh, mais c’est normal, ça, maman.
  Doris : En général. En général, c’est normal. Mais dans notre famille, chérie, toutes les femmes meurent très jeunes. Nous sommes toutes de constitution fragile.
  Suzanne : Mémé est toujours vivante.
  Doris : À peine ! Sois gentille, ne me contredis pas. Je veux seulement t’avertir. Il est possible que je n’ai plus beaucoup de temps à vivre sur cette Terre, et je ne voudrais pas t’inquiéter mais je veux que tu te fasses à l’idée de ma mort. Il est très important que tu te rendes compte à quel point ta vie m’est précieuse.
    […]
  Suzanne : Oh ! Je sens que je vais me suicider !

Il est assez difficile de comprendre le lien logique entre ces deux éléments, "Je veux que tu te fasses à l’idée de ma mort." et "Il est très important que tu te rendes compte à quel point ta vie m’est précieuse" !

Manipulation et culpabilisation resurgissent en force quand Suzanne sort avec Jack. Si sa fille est amoureuse, Doris risque de la perdre. Aussi l’attend-elle à son retour :

  Doris : Est-ce que tu as une idée de l’heure qu’il est, chérie ? Je suppose qu’il ne t’est même pas venu à l’esprit que je pouvais me faire un sang d’encre en ne te voyant pas rentrer ? J’étais à deux doigts d’appeler tous les hôpitaux de la ville.
  Suzanne : Pardon, maman. Je ne t’ai pas téléphoné parce que je te croyais couchée, je ne voulais pas te réveiller, et je suis rentrée à la maison pour pas que tu te fasses du souci.
  Doris : Eh bien, je m’en suis fait, figure-toi. Regarde-moi, je suis à ramasser à la petite cuillère.
  Suzanne : Ah, maman…
  Doris : Est-ce que je savais si t’étais pas allée te droguer quelque part. Je suis censée veiller sur toi maintenant. Je suis responsable de toi, tu es ma fille. Qu’est-ce que je devais penser en voyant que tu ne rentrais pas ?
    […]
  Doris : Je dirais que c’est ta toxicomanie qui m’a fait sombrer dans la déprime. Je te trouve plutôt mal placée pour me juger.
    […]
  Doris : Je ne t’ai pas élevé pour que tu te conduises comme ça, mais si tu le fais, j’ose espérer que faute de moralité, il te reste encore un peu de bon sens.

Effet de l’instinct de conservation, la manipulation sert aussi à se mettre en avant. Lors de la soirée, Doris rentre avec Suzanne dans la maison où les attendent les invités. Elle clame théâtralement : "Ma petite fille est de retour ! Oh !" Elle l’étreint alors, geste de tendresse qu’elle n’a jamais avec Suzanne quand elle est seule avec elle. Elle pousse alors Suzanne à chanter en ajoutant à la manipulation une touche de flatterie : "Chante un morceau de mon tour de chant. Fais-moi plaisir. Une chanson pour ta vieille maman. […] Tu as une voix tellement merveilleuse. Tu ne rends pas compte de ton talent." On notera qu’elle lui demande une chanson de son tour de chant, ce qui facilitera la comparaison en sa faveur quand ce sera son tour :

  Un invité : Allez, Doris, maintenant à toi. Chante-nous quelque chose !
  Doris : [Elle prend un air stupéfait, bouche ouverte, main sur le cœur.] C’est la fête de ma fille ce soir. Vraiment je…
  Assistance : Oh !
  Doris : [Elle prend un air modeste et se tourne vers Suzanne.] Vraiment, tu crois que je devrais ?
  Suzanne : Oui.
  Doris : Bon, tu as chanté pour moi, je vais chanter pour toi. [Elle se tourne vers le pianiste et, quittant son ton doucereux, lui indique le morceau qu’elle avait prévu depuis longtemps de chanter.] "Je suis toujours là", en ré bémol. [Elle s’assoit, retrousse sa robe à mi-cuisse et chante.]

La compétition avec sa fille, flagrante dans cette scène, est perceptible dans tout le film : "C’est pas possible que je rivalise avec toi. S’il y en avait une qui gagnait ? Tu veux que je me débrouille bien, mais pas mieux que toi. Surtout pas." lui assène Suzanne. Chanteuse et actrice alcoolique dont la carrière est en déclin, Doris n’a plus que cette comparaison avec sa fille pour valoriser son image.

Et l’image, c’est crucial pour Doris, comme pour tout membre du centre émotionnel : "Quand je craque, je me déteste." "Souvent, j’ai pas l’impression de te parler à toi. J’ai l’impression de parler à ton prof d’art dramatique.", lui dit Suzanne. Dès que Doris est en public, elle s’estime face à un public et est en représentation :

  Dr Frankenthal : Elle a l’air d’être en pleine forme.
  Suzanne : Elle s’en sort beaucoup mieux en public que dans la vie privée.

Quand elle se retrouve à l’hôpital après un accident de voiture dû à son ébriété, la seule chose qui inquiète vraiment Doris, c’est l’état de sa perruque et de ses sourcils : "Donne-moi mon miroir. Oh mon Dieu ! Quelle catastrophe ! Regarde ça. Ça ne me dérange pas de vieillir. De toute façon, je ne pensais pas vivre si longtemps. Ce qui me dérange vraiment, c’est d’avoir l’air vieille." Comme il faut "surmonter les difficultés avec panache" et que les journalistes l’attendent dehors, elle se laisse maquiller par Suzanne : "Comment je suis ? Pas mal pour une vieille bique, non ?"

Même son amour pour sa fille est mis en scène. Quand Suzanne a sa première séance de groupe pour sa désintoxication, Doris, retenue par son travail, est en retard ce qui ne l’empêche pas dire haut et fort : "Oh ma chérie, bonjour ! Oh ma chérie ! Oh ! J’arrive trop tard pour la petite réunion de famille ? J’aurais tant voulu ne pas rater ça. […] J’avais tellement hâte de parler à ma fille."

La séduction agressive de l’instinct sexuel est aussi très visible. Doris flirte outrageusement avec Jack qui est venu chercher Suzanne pour passer la soirée avec elle :

  Doris : En tout cas, vous ne correspondez pas à l’idée que je me faisais d’un fermier.
  Jack : Oh ! Et vous ne correspondez pas à l’idée que je me faisais d’une mère.
  Doris : [Elle glousse.] Si tous les fermiers vous ressemblaient, je n’ai pas l’impression que ça pousserait beaucoup.
  Jack : [Ils rient tous les deux.] Ça dépend de quelle tige on parle. [Ils rient.]
  Doris : [Elle lui met la main sur le bras.] Oh pour ça, je vous fais confiance.

Elle ne comprend pas que cela gêne Suzanne : "Mais les amis, on peut les partager." Quand elle chante à la soirée, Doris retrousse sa robe jusqu’à mi-cuisse provoquant à un "Ouh !" d’enthousiasme de l’assistance, mais dans ce domaine aussi, elle peut mieux faire :

  Suzanne : Quand j’ai eu 17 ans pour mon anniversaire, tu as soulevé ta jupe devant tout le monde.
  Doris : Je n’ai pas soulevé ma jupe. Elle a été aspirée. Tu te souviens des mauvaises choses et tu oublies les bonnes. Et les 20 musiciens que j’avais fait venir à cette fête ? Tu t’en souviens de ça. Non, la seule chose que tu n’as pas oubliée, c’est qu’accidentellement ma jupe a été aspirée.
  Suzanne : Seulement en dessous, t’avais rien.
  Doris : Bah…

La passion d’orgueil est explicite pendant tout le film, et la fixation de dédain l’accompagne occasionnellement : "Ce sont des brasseurs de capitaux. Ce que peuvent être les talents créatifs, ça leur passe au-dessus de la tête. Les acteurs ne sont pas bien traités. Les actrices, alors, on les traite comme de la… Dieu sait que j’ai horreur de ce mot, mais de la… De la merde."

Conséquence de l’accident de voiture et peut-être du changement de comportement de Suzanne après sa discussion avec Lowell, Doris prend conscience de sa rivalité avec sa fille : "Tu sais ma chérie, je crois que je suis un peu jalouse de toi. Et ça, c’est parce que maintenant c’est ton tour." On peut y voir une chance d’intégration.

Identification avancée : Doris est un 2 α à aile 3 manifestant à la fois les caractéristiques des sous-types conservation ("Privilège"), social ("Ambition") et sexuel ("Séduction agressive"). Il est difficile de dire lequel des trois instincts est le plus blessé !

Bons baisers d'Hollywood : Suzanne ValeSuzanne Vale (Meryl Streep) : 6

Suzanne est en très profonde souffrance et, comme toujours dans ces cas-là, il est tentant de lui attribuer un type émotionnel, de préférence le 4. Toutefois cette hypothèse est contredite par le mode de communication de Suzanne qui est vraiment peu émotionnel. Les autres voient en elle de l’émotivité. Julie Marsden, la psy qui conduit sa cure de désintoxication lui dit : "Il faut que tu sois maître de tes sentiments avant qu’ils soient maîtres de toi." Le docteur Frankenthal lui écrit qu’elle est "une bien jolie femme à la sensibilité exacerbée". C’est tout de suite un sujet de plaisanterie entre Aretha et elle :

  Aretha : [Elle vient de lire la lettre du docteur Frankenthal.] Bravo, il peut dire tout ça rien qu’au contenu de ton estomac !
  Suzanne : Je dois être super-sensible vu tous les trucs que je prends.

On va retrouver systématiquement cet humour pendant les grands moments de stress. À l’hôpital après son overdose, alors qu’elle est dans un état semi-comateux où le contrôle social de soi ne s’exerce plus, elle a cet échange avec le médecin qui la soigne :

  Dr Frankenthal : Suzanne, il va falloir faire un lavage d’estomac.
  Suzanne : Je suis obligée de rester ?

Plus tard, lors de la grande scène de rupture avec Jack, elle réagit ainsi à ses propos :

  Jack : On devrait arrêter les frais. C’est ridicule. C’est pas le côté que je préfère chez toi.
  Suzanne : J’ai pas de côtés. Je suis pas une boîte.

Après un accident de voiture bénin, sa mère se retrouve à l’hôpital, et Suzanne déclare : "On devrait demander un tarif de groupe."

Mais l’humour est aussi présent dans la plupart des échanges, même moins dramatiques. Suzanne reçoit un bouquet de la part du docteur Frankenthal :

  Aretha : Des fleurs pour toi, Suzanne !
  Suzanne : Oh ! Qui est-ce qui est mort ?
  Aretha : Toi et moi. Enfin, on était sur la bonne voie.

Suzanne apprécie et réagit immédiatement à l’humour des autres. Elle apprécie l’humour d’Aretha lors de sa première rencontre avec Doris qui réprime le centre mental et est dans la confusion :

  Doris : Aretha, c’est plutôt original comme nom.
  Aretha : Je sais, oui. Je crois que mes parents s’attendaient à avoir quelque chose d’un peu plus noir.
  Suzanne : [Elle rit.]
  Doris : Vous êtes noire ?
  Aretha [Atterrée mais calme et souriante.] Heu, non.

L’assistant qui va s’occuper de Suzanne sur le tournage se présente à elle :

  Ted : Bonjour, je m’appelle Ted. Je suis programmé pour faire de votre vie un véritable calvaire.
  Suzanne : [Elle rit.] Je m’appelle Suzanne. Je suis programmée pour vivre un calvaire.
  Ted : Alors on devrait bien s’entendre.

Doris lui reproche son impatience :

  Doris : Ton gros problème, c’est que tu es trop impatiente. Tout ce que tu recherches, ce sont les satisfactions immédiates.
  Suzanne : Les satisfactions immédiates, ça prend trop de temps.

Jack essaye de lui faire croire qu’il est amoureux d’elle :

  Jack : J’ai des sentiments.
  Suzanne : Combien ? Plus de deux ?
  Jack : Je peux pas continuer si je sens que tu vas te fiche de moi.
  Suzanne : Tu me promets ? Non non, c’est pas ça. C’est pas que je vais me fiche de toi, c’est que je suis en train de me fiche de toi. [Elle rit.] Pardon. Je m’arrête, excuse-moi.

La préférence pour le mental avec le sentiment de supériorité qui en découle est relevée deux fois par Doris : "Je ne dissèque pas les choses comme un toi. J’ai eu un pressentiment. J’ai rêvé qu’il ne fallait pas faire ce film.", "J’ai toujours essayé d’être une bonne mère pour toi et comme remerciements, j’avais droit à ta froideur et à tes grands airs supérieurs. Depuis que tu as 14 ans, tu es persuadée que sur le plan intellectuel, je ne t’arrive pas à la cheville. Et à juste titre d’ailleurs. Tu étais plus cérébrale que je le suis. Non, que je l’étais. Peu importe."

L’humour et la cordialité — Suzanne est extrêmement souriante — se conjuguent avec une incapacité à voir les aspects positifs de sa vie qui pointent clairement vers l’ennéatype 6 :

  Lowell : Y’a pas beaucoup de gens qui viendront te plaindre. Tu sais combien de gens donneraient leur bras droit pour faire le métier que tu fais et avoir le genre de vie que tu as ?
  Suzanne : Je sais mais le problème c’est que ce que je vis, je n’arrive pas à le ressentir. Je vois ma vie qui défile à côté de moi et je sais que… je devrais m’estimer heureuse mais je vois que les mauvais côtés. C’est comme ce qui se passe avec ma… ma mère. Je sais que si elle fait tout ça, au fond c’est parce qu’elle m’aime, mais j’arrive pas à y croire. Et tout un tas de trucs comme ça.

Ce manque de joie est perceptible dans son métier. Suzanne adore son travail : "Je me sens mieux quand je travaille. Je me sens utile. Je sers à quelque chose.", "Moi, j’aime travailler." Pourtant, les trois producteurs du film lui reprochent son manque d’implication, et Simon, le metteur en scène, confirme : "Tu pourrais t’amuser un peu plus. Ce serait bien que tu t’éclates davantage."

Suzanne n’exprime pas verbalement sa passion de peur, sauf peut-être dans le "je suis obligée de rester" lors du lavage d’estomac, mais celle-ci est bien visible non verbalement. Elle est terrorisée lors de la colère de Lowell aussi bien quand elle s’exerce contre elle ("Si tu bousilles mon film, je te tue.") que contre Cindy, sa pourvoyeuse de drogue. Elle est effrayée quand elle apprend les conditions de tournage d’une des scènes du film : "N’oubliez pas qu’on a des serpents vivants dans cette scène. Alors soyez gentils, la plus grande prudence s’impose." La peur est plusieurs fois relevée par l’entourage de Suzanne. À propos de son séjour chez elle, Doris lui dit : "Je ne veux pas que tu te fasses de souci pour ça maintenant. Je m’occuperais de tout pendant ton séjour ici. Aucun motif d’anxiété. Je ne veux pas que tu aies des choses qui te trottent dans la tête. Je veux que tu aies l’esprit libre et les idées claires." La psy de l’hôpital pointe aussi la peur :

  Julie Marsden : Je sais que vous avez peur et je veux que vous le sachiez. Ici, c’est l’endroit qu’il faut pour affronter ça.
  Suzanne : [Elle craque.] Quand je pense que j’ai failli mourir ! C’est pas… C’est pas ce que je voulais faire. Pas du tout.
  Julie Marsden : Qu’est-ce que vous vouliez faire ?
  Suzanne : J’en sais rien.

La fixation de doute est aussi bien présente. Elle doute de Jack dont elle ne sait jamais s’il est sérieux ou non. Elle doute de ses qualités et de sa compétence professionnelle comme quand elle surprend la conversation du metteur en scène et de l’habilleuse. Après la première journée de tournage, les producteurs estiment que Suzanne ne se donne pas à fond. Elle s’inquiète :

  Suzanne : Peut-être que je n’accepte pas les critiques aussi bien qu’il faudrait, mais tout de même j’ai eu qu’une journée de travail sur le tournage, et c’est déjà la deuxième fois qu’on vient de me parler de ce qui manque à mon interprétation.
  Neil Bleene : Pour l’instant, on parle de deux minutes de film. Deux minutes de pellicule sur quatre-vingt-dix.
  Suzanne : C’est réparable ?

Elle soupçonne aussi les autres, par exemple les assureurs qui exigent un "garant de responsabilité" pour accepter de la faire tourner : "Je vois très bien. Je vois qu’ils me punissent."

Bien sûr, c’est avec Doris que Suzanne manifeste le plus le doute : "C’est comme ce qui se passe avec ma… ma mère. Je sais que si elle fait tout ça, au fond c’est parce qu’elle m’aime, mais j’arrive pas à y croire." Typique du 6 face à une figure d’autorité, elle oscille en permanence avec elle entre une adoration tendre et un rejet colérique. Elle est obsédée par cette relation au point de commettre ce lapsus dans la première scène de tournage : "Vous aurez beau encaisser toute la maman du monde, vous n’arriverez jamais à rien."

La problématique avec l’autorité est plus vaste que la relation avec sa mère. En discussion avec Tonton Marty, Suzanne se définit comme "une starlette de ciné qui rue dans les brancards". Elle adore sa grand-mère dont l’autorité est perçue comme une limite : "On croirait entendre une voix qu’on a dans la tête et qui nous interdirait toute initiative." Cependant elle se révolte contre elle quand Doris est hospitalisée après son accident de voiture :

  Suzanne : Oh mémé, ferme-la.
  Grand-mère : [Stupéfaite et indignée.] Je te demande pardon ?
  Suzanne : Je crois que tu devrais, oui.
    […]
  Suzanne : [Elle se lève d’un bond, attrape fermement sa grand-mère et la fait sortir de la chambre.] Allez, viens ! Hop ! On y va.
  Grand-mère : Qu’est-ce que vous croyez faire, Mademoiselle ?
  Suzanne : Je t’emmène gentiment dans la salle d’attente.

Le doute rend Suzanne ambivalente et imprévisible : "On sait jamais avec moi." Cela la "perturbe", et elle aspire à une existence plus simple : "Je vais laisser tomber ce métier. Si je continue, je n’aurai jamais l’ombre d’une chance de mener une vie normale."

Tonton Marty, l’imprésario de Suzanne, est conscient qu’elle devrait se détacher de sa mère et trouver un autre groupe d’appartenance :

  Doris : J’avoue qu’une fois sur deux, l’humour de ta génération m’échappe.
  Suzanne : Je n’ai pas de génération.
  Tonton Marty : Alors tu devrais t’en trouver une.

Lorsque Suzanne veut dire quelque chose de gentil à Jack, c’est la vertu de son type qui lui vient à l’esprit :

  Suzanne : Je sais pas quoi te dire.
  Jack : J’aurais mieux fait de pas t’en parler.
  Suzanne : C’est très gentil. Non non non, c’est bien que tu me l’aies dit. Je trouve ça… Courageux.

Suzanne a une très mauvaise image d’elle-même : "Rien de ce que tu peux me dire n’est aussi horrible que ce que je me dis à moi-même. Et au moins, ça se passe en dehors de ma tête ce qui est plus facile à assumer." Il est donc probable que cet échange avec son metteur en scène soit une expression du mécanisme de défense de projection :

  Lowell : Et puis même, tu peux pas retourner à l’hôpital, j’ai du travail pour toi.
  Suzanne : Tu retravaillerais avec moi ? T’aurais pas honte ?

La peur et le doute provoquent des moments de répression du centre mental. Quand les producteurs lui reprochent un certain manque d’implication, elle va s’en plaindre au metteur en scène :

  Suzanne : Le pépin, Simon, c’est que des centaines de personnes viennent me parler de mon indice d’émerveillement qu’on trouve atrophié. Ça me… Ça me perturbe. Alors si c’était possible, je préférerais recevoir des instructions uniquement de toi.
  Simon : Vraiment ! Des centaines de personnes ! Ce n’est pas bien, je vais leur dire deux mots.

Quand elle apprend que Tonton Marty est parti avec la caisse, elle ne comprend pas ce que lui dit Doris :

  Doris : Ma chérie, j’ai une nouvelle… [Pause théâtrale.] Oh ! Effroyable à t’annoncer et je ne veux pas que tu te mettes en colère contre moi parce que je l’avais prédit.
  Suzanne : [Inquiète.] Mais quoi ?
  Doris : Ton homme d’affaires et agent bien-aimé, Marty Weiner, l’homme avec qui tu es restée contre vents et marées, que je t’ai implorée de laisser tomber…
  Suzanne : Maman…
  Doris : Oui ma chérie ?
  Suzanne : Allez, accouche.
  Doris : J’y arrive. Si je prends des gants pour te le dire, c’est que je sais que tu vas être bouleversée. Moi, ça m’a coupé les jambes. Marty Weiner s’est évaporé.
  Suzanne : Évaporé ?
  Doris : La police a téléphoné hier soir. Ils ont dit qu’il était introuvable et que tout l’argent de ses clients s’était fait la malle.
  Suzanne : [Affolée.] Ça veut dire quoi ? Que j’ai plus un radis ? C’est ça ?
  Doris : J’en sais rien. Moi je te dis ce que je sais.
  Suzanne : [Affolée.] Mais ils arrivent pas à le trouver ? Et si je veux lui faire un procès ?

La longue conversation avec Lowell est le début de l’intégration pour Suzanne qui lui permet de relancer sa carrière et de changer sa relation avec sa mère… à moins qu’elle se soit trouvé une nouvelle loyauté ("Merci mon Dieu !").

Identification avancée : Suzanne est un 6 α à aile 7 de sous-type conservation ("Cordialité"). L’instinct sexuel ("Force-Beauté") est aussi très visible : "Je veux pas que la vie imite l’art, je veux que la vie soit de l’art."

Bons baisers d'Hollywood : Lowell KolchekLowell Korshack (Gene Hackman) : 8

Quand, au tout début du film, Suzanne loupe sa scène avec les douaniers mexicains, Lowell réagit avec une certaine indulgence. Quand il comprend, en voyant une mimique de ses techniciens, que les erreurs de Suzanne sont dues à de la prise de drogue, il réagit immédiatement :

  Lowell : Si tu bousilles mon film, je te tue.
  Suzanne : Quoi ?
  Lowell : Tu sais très bien de quoi je parle. Tout le monde le sait sur ce plateau. Je me fous de ce que tu fais pendant ton temps de libre, mais c’est mon temps à moi et c’est mon film. Je n’ai pas du tout l’intention de voir une petite actrice trop gâtée, défoncée, égoïste foutre mon film en l’air.
  Suzanne : [Elle fait une moue.]
  Lowell : Je compte sur toi pour te ressaisir et en mettre un bon coup les derniers jours. Sinon je te tue. Je te tue avant que tu le fasses toi-même. Je ferais du meilleur boulot. Tu es tellement à côté de tes pompes que tu te louperais. Tu vas nous la faire jusqu’au bout ce coup-ci ?
  Suzanne : [Effrayée.] Ouais.

Il se retourne alors vers la dealeuse :

  Lowell : Vous ! Comment vous vous appelez ?
  Cindy : Cindy.
  Lowell : Cindy. Cindy, vous vous cassez de ce plateau et je ne veux plus vous voir. Si je vous chope ici en train de lui refiler de la drogue, je me fends d’un jeton de téléphone et j’appelle les stups. Allez, du balai. [Cindy s’éloigne, et il se retourne vers le reste de l’équipe.] Y’a pas d’autres candidats ? Quelqu’un qui veut se faire coffrer ou assassiner avant qu’on boucle ce putain de film ? On se la refait.

Il suffit d’observer les réactions non verbales de Suzanne et de Cindy pour comprendre que les menaces de Lowell ne sont pas prises à la légère.

Lowell ne réapparaît qu’à la fin du film où il se montre très protecteur et aidant avec Suzanne :

  Lowell : Tu es beaucoup mieux que tu ne le mérites dans le film.
  Suzanne : [Elle rit.] Bon. Je veux dire, merci Lowell. Excuse-moi. J’ai dû être un vrai cauchemar.
  Lowell : Mais tu es mieux maintenant.
  Suzanne : Oh oui. Non, je crois pas.
  Lowell : Tu es mieux parce que tu ne te drogues plus et…
  Suzanne : Et pire parce que je me drogue plus.
  Lowell : Oui mais pire dans le bon sens.
    [Ils revoient la scène du tournage où Suzanne a fait le lapsus argent-maman.]
  Suzanne : Merde.
  Lowell : C’est la meilleure qu’on ait eue de la journée. Après, on n’a jamais réussi à en finir une.
  Suzanne : Je suis désolée. Pardon.
  Lowell : Sois pas désolée. Arrange-moi ça.
    [Ils font la postsynchronisation de la scène. À la fin, Suzanne détourne la tête pour cacher qu’elle a les larmes aux yeux. Seul Lowell s’en aperçoit.]
  Lowell : C’est bon les gars. [Il prend un mouchoir en papier.] Faites une pause de cinq minutes. [Il rejoint Suzanne et lui donne le mouchoir.]
  Suzanne : Merci.
  Lowell : Qu’est-ce qui peut y avoir de si grave ? Tu es revenue sur tes pas et tu as effacé le passé, en tout cas dans ton travail.
  Suzanne : [Elle soupire, un peu soulagée.] Ouais.
  Lowell : Comment imaginer meilleure métaphore ? C’est pas à cause de quelque chose que j’ai dit ?
  Suzanne : Rien de ce que tu peux me dire n’est aussi horrible que ce que je me dis à moi-même. Et au moins, ça se passe en dehors de ma tête ce qui est plus facile à assumer.
  Lowell : Ce qui va pas chez toi, c’est que ça t’est tombé tout cuit et que tu ne t’en rends pas compte.
  Suzanne : Si je m’en rends très bien compte.
  Lowell : Y’a pas beaucoup de gens qui viendront te plaindre. Tu sais combien de gens donneraient leur bras droit pour faire le métier que tu fais et avoir le genre de vie que tu as ?
  Suzanne : Je sais mais le problème c’est que ce que je vis, je n’arrive pas à le ressentir. Je vois ma vie qui défile à côté de moi et je sais que… je devrais m’estimer heureuse mais je vois que les mauvais côtés. C’est comme ce qui se passe avec ma… ma mère. Je sais que si elle fait tout ça, au fond c’est parce qu’elle m’aime, mais j’arrive pas à y croire. Et tout un tas de trucs comme ça.
  Lowell : Je sais pas ce qui s’est passé avec ta mère, mais elle te maternera plus quand tu seras plus un bébé.
  Suzanne : [Elle rit.] Tu connais pas ma mère.
  Lowell : Non, je ne la connais pas, mais toi, je te connais. Tu transformerais en mère n’importe qui. Écoute. Ta mère t’a fait ça, et sa mère le lui a fait avant, et tu peux remonter comme ça jusqu’à Ève. À un certain moment faut arrêter les frais et te dire : "Et merde, je commence par moi."
  Suzanne : [Émue et admirative.] Tu viens de trouver tout ça maintenant.
  Lowell : [Il rit, un peu gêné.] En fait j’ai travaillé avant que tu arrives. Si tu étais venue une demi-heure plus tard, comme prévu, j’aurais pu fignoler.
  Suzanne : [Ils rient tous les deux.] C’est déjà pas mal comme ça.
  Lowell : Ça te plaît parce que ça ressemble à un dialogue de film.
  Suzanne : C’est tout moi, ça. Je veux pas que la vie imite l’art, je veux que la vie soit de l’art.
  Lowell : [Il lui remontre la scène.] Regarde. Regarde ça. Tu vois ce que tu sais faire. Et tu n’étais même pas dans ton état normal, tu te rends compte. Imagine de quoi tu serais capable.
  Suzanne : Faudrait peut-être que je… reparte en clinique.
  Lowell : Tu sais, se dépasser ce n’est pas comme au cinéma où tu as une révélation et aussitôt ta vie change. Tu vois, dans la réalité, tu as une révélation et puis ta vie, elle change au bout d’un mois ou deux.
  Suzanne : [Elle rit.] Alors j’ai plus qu’un mois à attendre.
  Lowell : Tout dépend du genre de révélation que tu as. Parfois, il suffit d’une semaine ou deux au maximum. Je crois que tu es beaucoup mieux en train de te battre ici qu’en train de te laisser aller à l’hôpital parce que de toute façon, un jour ou l’autre, il va falloir que tu viennes te battre. Alors autant te jeter à l’eau. Et puis même, tu peux pas retourner à l’hôpital, j’ai du travail pour toi.
  Suzanne : Tu retravaillerais avec moi ? T’aurais pas honte ?
  Lowell : Oh, ça serait pas avant un mois ou deux. Ça te laisserait la marge pour ta révélation. Grandis. Quitte ta mère.
  Suzanne : [Ils s’étreignent.] Merci, mon Dieu.

Le plus révélateur de l’ennéatype dans cette scène est le style de communication de Lowell :

  • Le langage est direct : "Tu es beaucoup mieux que tu ne le mérites.", "Ce qui va pas chez toi, c’est que ça t’est tombé tout cuit et que tu ne t’en rends pas compte.", "Elle te maternera plus quand tu seras plus un bébé."
  • Les émotions sont écartées au profit de l’action et du pragmatisme : "Sois pas désolée. Arrange-moi ça."
  • L’impératif est utilisé plusieurs fois : "Sois pas désolée. Arrange-moi ça.", "Grandis. Quitte ta mère."
  • La vie est perçue comme un combat : "Je crois que tu es beaucoup mieux en train de te battre ici qu’en train de te laisser aller à l’hôpital parce que de toute façon, un jour ou l’autre, il va falloir que tu viennes te battre."

Identification avancée : Lowell Korshack est un 8 μ.

Bons baisers d'Hollywood : Jack FaulknerJack Faulkner (Denis Quaid) : 7

Au début du film, Jack se réveille, ivre, au côté de Suzanne qui a fait une overdose. Il la conduit à l’hôpital et malgré son stress, ou peut-être à cause de lui, il ne résiste pas à faire une plaisanterie au préposé aux urgences : "Une livraison ! Je vous dépose cette femme." Même si son humour n’apparaît guère dans la suite du film, une réflexion de Suzanne laisse penser qu’il est une attitude coutumière chez Jack :

  Suzanne : J’arrive jamais à savoir quand tu rigoles.
  Jack : Je suis très sérieux.

Évidemment, juste après avoir donné les renseignements nécessaires au secrétariat de l’hôpital, en bon 7 égotique refusant les responsabilités, il s’enfuit sans accepter de laisser ses coordonnées :

  Secrétaire : Avez-vous un lien de parenté avec la patiente ?
  Jack : Ah non non non. Il n’y a aucun lien. C’est à peine si je la connais. Je l’ai trouvé comme ça et je l’ai amené ici.
    […]
  Secrétaire : Où peut-on vous joindre ?
  Jack : C’est moi qui vous téléphonerai.

Là-dessus, Jack quitte l’hôpital en courant. Est-il besoin de dire qu’il ne téléphonera pas pour avoir des nouvelles de Suzanne ? Quand plus tard il la retrouve sur le tournage du film, il lui raconte ce qui s’est passé comme si c’était arrivé à quelqu’un d’autre, expression du style de communication de l’ennéatype : "Tu te souviens de Monsieur Craverly. Le prof de sciences nat’. C’est horrible ce qui lui est arrivé. […] T’es sûre que tu la connais pas cette histoire ?"

La passion d’intempérance s’exerce principalement dans le cadre de son sous-type : "C’est sa grande passion : les femmes. Alors tu vois, le mieux, c’est d’essayer de prendre du bon temps avec lui comme lui, il prend du bon temps avec toi.", dit de lui Evelyn Aymes. Jack ne met aucune émotion vraie dans sa démarche de séduction ; il a une "tirade standard pour emballer" et, juste avant de succomber, Suzanne en est bien consciente : "On dirait un marchand de tapis."

Jack couche dans la même journée avec Evelyn et Suzanne, et cela lui laisse de temps de flirter avec Doris, plaisanterie grivoise à l’appui :

  Doris : En tout cas, vous ne correspondez pas à l’idée que je me faisais d’un fermier.
  Jack : Oh ! Et vous ne correspondez pas à l’idée que je me faisais d’une mère.
  Doris : [Elle glousse.] Si tous les fermiers vous ressemblaient, je n’ai pas l’impression que ça pousserait beaucoup.
  Jack : [Ils rient tous les deux.] Ça dépend de quelle tige on parle. [Ils rient.]
  Doris : [Elle lui met la main sur le bras.] Oh pour ça, je vous fais confiance.

Quand Suzanne découvre la situation, c’est d’ailleurs à la passion du 7 qu’elle fait référence, problématique que Jack reconnaît bien volontiers :

  Suzanne : La modération, t’as entendu parler ? T’as entendu parler de la modération ?
  Jack : La modération, c’est peut-être pas mon fort.

Jack est accablé par le fait que Suzanne réagit avec colère à sa double relation : "Ça y est, c’est parti." Il propose donc d’ignorer le problème : "On devrait arrêter les frais. C’est ridicule. C’est pas le côté que je préfère chez toi." Comme elle poursuit la discussion, il applique la stratégie des 7 consistant à reporter la faute sur l’autre, quitte à s’aider d’un brin de rationalisation :

  Jack : Il faut que tu rentres en compétition avec tout le monde.
  Suzanne : Ah parce que toi, non ?
  Jack : Non, moi non.
  Suzanne : C’est moi qui te rends comme ça.
  Jack : Exactement.
  Suzanne : Ouais, t’es arrivé où t’en es dans ce métier sans entrer en compétition avec personne !
  Jack : C’est pas de la compétition, ça. C’est de l’ambition, de l’ambition associée au talent.
  Suzanne : Si c’est toi qui le dis…

Évidemment, la frustration d’être empêché de jouir avec légèreté de la vie provoque la colère : "Vous êtes toutes des connes et vous me faites chier. […] Tu sais, t’étais un peu plus marrante quand t’étais défoncée."

Cette manière de considérer les autres avait déjà été manifestée quand il traite de "sales cons" l’équipe de tournage du film dans lequel joue Suzanne. Lui "aurait mis les voiles". Revoilà la fuite.

Identification avancée : Jack Faulkner est un 7 α à aile 8 de sous-type sexuel ("Imagination").

Bons baisers d'Hollywood : Grand-mèreGrand-mère (Mary Wickes) : 8

Grand-mère s’exprime haut et fort et ponctue son discours d’onomatopées et de grands rires tonitruants, une manière de parler de "cul-terreux" d’après Doris. Elle dit ce qu’elle a à dire sans fioriture et n’hésite pas à donner des conseils de vie à Aretha moins d’une minute après l’avoir rencontrée :

  Grand-mère : Eh ! Laisse-moi te regarder ma toute belle avant que ta vieille mémé trimballe ses grosses fesses jusqu’à son lit.
  Suzanne : Fais-moi un gros mimi, mamie.
  Grand-mère : Pour sûr que t’as un fumet affriolant.
  Suzanne : C’est mon amie Aretha.
  Grand-mère : Bonjour et au revoir. Nous filons à l’anglaise.
  Suzanne : Oh non ! Tu t’en vas déjà, mémé ?
  Grand-mère : Oh tu sais, ta mère a déjà commencé à boire son vin, alors j’ai pas envie de passer la nuit à l’écouter caqueter comme une poule. J’ai intérêt à jouer les filles de l’air. Hé ! Maintenant que t’es mieux, tu devrais essayer de la mettre au régime sec.
  Suzanne : [Elle rit et s’éloigne.]
  Grand-mère : Ah oui, je sais, têtu comme une mule. Elle tient de son grand-père.
    […]
  Grand-mère : Je vais me faire voir ailleurs, ma biquette. [Elle se tourne vers Aretha.] Vous devriez manger de temps en temps. Vous êtes pas plus grosse qu’un pain de savon après le grand lavage de printemps. Ha ha ha ! [À Suzanne] Bonsoir poupée. [Elle part en courant.]

Son ennéatype s’exprime avec encore plus de vigueur après l’accident de voiture de Doris qui ne l’inquiète pas outre mesure :

  Grand-mère : C’était fatal. [Suzanne arrive.] Ah ! Tiens, voilà mon autre petit démon. Tous les deux pour vous voir ailleurs qu’à l’hosto, c’est pas de la tarte.
  Suzanne : [Suzanne se précipite dans les bras de sa mère.]
  Grand-mère : Elle va bien, oui. Elle s’est bugné la tête, c’est tout. Elle se fait du souci pour toi et, gourde comme elle est, elle a foncé dans son auto et embrassé un platane. Oh oh, je sais pas ce que je fabrique dans cette famille ! Une fille qui lève le coude et une petite fille droguée.
  Doris : [Elle pleurniche.] S’il te plaît, maman. S’il te plaît.
  Grand-mère : C’est ça. Pleure, tu pisseras moins. C’est ce que ma grand-mère disait tout le temps. [Elle se tourne vers Suzanne.] Franchement je t’assure que je ne sais pas d’où ça te vient, mais toi, t’es une enfant trop gâtée. Tout ce qu’on te donne, tu l’envoies promener. [Elle se retourne vers Doris.] Je t’avais dit de pas l’élever comme ça. Tu m’as écoutée à ce moment-là ? Compte là-dessus, bois de l’eau fraîche ! Alors venez pas me chercher, ni l’une ni l’autre. J’ai assez avec pépé.
  Suzanne : Oh mémé, ferme-la.
  Grand-mère : [Stupéfaite et indignée.] Je te demande pardon ?
  Suzanne : Je crois que tu devrais, oui.
  Grand-mère : [Elle s’adresse à Doris.] Voilà, tu vois, si tu lui avais frotté la bouche avec du savon noir quand elle était petite ; peut-être ça lui aurait fait…
  Suzanne : Je voudrais simplement suggérer qu’au lieu de se culpabiliser les unes les autres, on devrait simplement essayer d’être bien ensemble.
  Grand-mère : Oh ! Écoutez Mademoiselle au bec enfariné, se culpabiliser ! Oh oh oh !
  Suzanne : [Elle se lève d’un bond, attrape fermement sa grand-mère et la fait sortir de la chambre.] Allez, viens ! Hop ! On y va.
  Grand-mère : Qu’est-ce que vous croyez faire, Mademoiselle ?
  Suzanne : Je t’emmène gentiment dans la salle d’attente.
  Grand-mère : [Elle essaye de garder le contrôle.] C’est pas la peine de me pousser, je m’en vais. Tu sais ce qu’il te faudrait ? Il te faudrait une bonne fessée comme celles que je donnais à ta mère.

Avec sa fille et sa petite fille, elle est pour la manière forte ("frotter la bouche au savon noir", "une bonne fessée") même s’il est évident qu’elle les adore. Elle est aussi très protectrice avec son mari — "mon cœur" — qui a perdu la tête, "lui a envoyé une beigne pendant qu’[elle] essayait de lui enfiler son pyjama neuf", et la houspille verbalement : "Je t’ai entendu ! Garde ta bave pour toi, femme. Bla bla bla bla bla bla. C’est ce que tu fais toute la sainte journée."

Identification avancée : Grand-mère est un 8 α.

Bons baisers d'Hollywood : ArethaAretha (Robin Bartlett) : 9

Aretha a connu Suzanne pendant leur cure de désintoxication. Elle est présente auprès de Suzanne pendant toute la suite du film : à l’hôpital, au cours de la fête organisée par Doris ou pendant le tournage de Lowell Korshack. Lors de sa première rencontre avec Doris, elle fait une plaisanterie qui n’est pas comprise et manifeste dès ce moment la capacité d’acceptation du 9 :

  Doris : Aretha, c’est plutôt original comme nom.
  Aretha : Je sais, oui. Je crois que mes parents s’attendaient à avoir quelque chose d’un peu plus noir.
  Suzanne : [Elle rit.]
  Doris : Vous êtes noire ?
  Aretha [Atterrée mais calme et souriante.] Heu, non.

Cette attitude sera encore plus évidente lors de la fête face au grand-père de Suzanne qui a perdu la tête :

  Grand-père : Je veux rentrer chez moi.
  Grand-mère : Allez, on y va.
  Grand-père : Pas avec toi ! [Il se tourne vers Aretha.] Je veux rentrer chez moi. On s’en va bientôt ?
  Aretha : [Elle lui sourit.] Tout de suite. On y va tout de suite.
  Grand-père : Vous savez ce que mon papa a fait ?
  Aretha : Quoi ?
  Grand-père : De quoi on parle ?
  Grand-mère : Je vous le disais.

Identification avancée : Aretha est un 9 α de sous-type social ("Participation périphérique").

Autres

D’autres personnages peuvent être étudiés à l’aide de l’Ennéagramme :

Le docteur Frankenthal (joué par Richard Dreyfuss) qui est prêt à "attendr[e]" pour avoir "un vrai rencart" avec Suzanne est vraisemblablement un 9.

Sid Roth (joué par Sidney Armus), le couch potato qui est le deuxième mari de Doris mais qui "au lit est de la dynamite" ("Il faut se méfier de l’eau qui dort", dit Doris), appartient au même ennéatype 9, en version extrêmement désintégrée.

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