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La vie est belle
Analyse

Guido (Roberto Benigni) : 7

7 dans la vie réelle, Roberto Benigni dresse un portrait pour le moins flatteur du type.

Dès le début du film, dans la scène à la ferme où il va rencontrer Dora, son dialogue avec Eleonora, la sœur de celle-ci, est l’occasion de manifester le fameux "esprit de singe" du 7, une pensée qui saute extrêmement rapidement d’une idée à une autre :

  Guido : Comment vas ? Et qu’est-ce que tu fais ? Oh ! C’est beau tout ça. Qui c’est qui a mis tout ça là ? C’est ta maman ?
  Eleonora : Non, c’est la propriétaire.
  Guido : La propriétaire ! Oh, ben regardez-moi ça ! C’est un vrai marché ! C’est magnifique ! On peut acheter ? Combien ça coûte ? Tu as quel âge ? Où elle est ta maman ?

Quelques instants plus tard, Guido montre la capacité de planification caractéristique du type : bâtir très vite un plan, un moyen de profiter au mieux de la situation et de la vie en général. Il profite de ce que Dora a été piquée par une guêpe pour lui embrasser la jambe. De la même manière, il sait utiliser tout ce qu’il observe dans la vie quotidienne et toute opportunité qui se présente pour atteindre ses fins, séduire Dora ou protéger son fils :

  • La clé que Maria jette par la fenêtre, la solution de l’énigme que lui amène le docteur Lessing ou le chapeau qu’il vole à Oreste servent de preuves de la complicité du Ciel avec son entreprise de séduction ;
  • Le passage, à l’hôtel où il est employé comme serveur, du représentant du ministère qui doit inspecter l’école où travaille Dora est le prétexte à créer une nouvelle rencontre "due au hasard" avec elle ;
  • La ressemblance entre la voiture de son ami Ferrucio et celle du fiancé de Dora, Rodolfo, lui permet d’emmener Dora à la sortie de l’Opéra ;
  • La recherche par les fascistes d’un traducteur lui offre l’occasion de confirmer à son fils que le séjour dans le camp n’est qu’un grand jeu organisé pour gagner un tank…

Cette utilisation du mental pour manipuler la réalité lui sert aussi à influencer les gens, comme quand il fait croire à l’inspecteur qu’il y a tout un choix de plats à la carte et qu’il réussit à lui faire manger un saumon et une salade, seuls mets réellement à sa disposition.

Guido valorise considérablement la liberté. Quand il arrive en ville avec Ferrucio, il s’extasie : "On est en ville. Ici, on est complètement libre. Tu as envie de faire un truc, tu le fais. C’est pas magnifique ?" Mais bien entendu pour un 7, c’est une attitude très théorique : quand Ferrucio le prend au pied de la lettre et se met alors à crier et à sauter dans la rue, il le rabroue immédiatement avec une superbe mauvaise foi : "Arrête ! Qu’est-ce qui te prends ? Mais tu es fou, on est en ville ici." Lorsqu’il veut ouvrir une librairie, c’est "en toute légalité".

Quand quelqu’un lui déplaît, le 7 a tendance à le tourner en ridicule plutôt que de l’affronter directement. Très représentative de cette attitude est la scène du générique où Guido et Ferrucio se font acclamer par une foule de sympathisants fascistes comme leur voiture sans freins déboule dans le village. La scène de l’inspection dans l’école François Pétrarque est tout aussi typique : choisi par les "grands savants racistes", Guido expose son nombril ("l’authentique nombril d’origine italienne, le nombril de notre grande race") aux élèves et aux enseignants médusés et leur assène : "Où peut-on trouver quelqu’un de plus beau que moi ? Je vous le demande. Où peut-on trouver quelqu’un de plus beau que moi ?" Le 7 est l’un des types de l’Ennéagramme qui exprime le plus volontiers son autosatisfaction.

Tout cela permet à Guido de prendre la vie avec gaieté et humour. Le docteur Lessing dit de lui : "Tu es le serveur le plus spirituel que j’ai jamais rencontré." Même s’il y a une difficulté, il la prend avec légèreté :

  Guido : [Il essaye d’obtenir l’autorisation d’ouvrir une librairie.] Ça prend beaucoup de temps ?
  Employée : Des années.
  Guido : [Rires] Alors si c’est possible, j’aimerais autant commencer les démarches tout de suite.

Quant aux vrais problèmes, Guido préfère les ignorer. Lorsque les fascistes ont peint en vert le cheval de son oncle et ont écrit dessus "Achtung ! Achtung ! Cheval juif.", il refuse de voir venir le danger :

  Oncle : Ils finiront par s’occuper de toi.
  Guido : De moi ? Ça alors ! Et que veux-tu qu’ils me fassent à moi ? Qu’ils me déshabillent et me repeignent en jaune de la tête aux pieds en écrivant "Achtung ! Serveur juif." ? Ah, ça non, mon oncle. Je ne savais même pas qu’il était juif ce cheval.

Plus tard quand il y a écrit sur le rideau de fer de sa librairie "Commerçant juif" et que son fils Giosuè l’interroge sur la présence d’une pancarte "Interdit aux juifs et aux chiens" sur la devanture d’une pâtisserie, il n’y croit toujours pas vraiment et plaisante sur l’idée d’écrire "Interdit aux araignées et aux Wisigoths" sur sa propre vitrine.

C’est encore l’optimisme, parfois naïf, du 7 qui lui fait croire en l’aide possible du docteur Lessing : "On partira peut-être plus tôt que prévu.", annonce-t-il immédiatement à son fils car une bonne nouvelle, un bon espoir, cela se partage. C’est encore cette volonté de croire au miracle qui le fait essayer d’imposer au monde ses projets à grands coups de passes hypnotiques et qui le fait soliloquer dans le camp de concentration : "Peut-être que tout ça n’est qu’un rêve. De toute façon, on est en train de rêver."

Une fois avec son fils dans le camp de concentration, il ne lui reste qu’à lui montrer l’ampleur de son amour. Pour un 7, amour et humour sont des mots bien semblables ; aimer l’autre, c’est le protéger de la souffrance par une pensée et une imagination positives. Là aussi, il est étonnant de voir à quel point Guido trouve rapidement une manière positive de présenter la situation à son fils et cela dès le départ du train qui les emmène au camp : "On part pile à l’heure. Quelle organisation ! J’ai eu les derniers billets. Un vrai miracle !"

Identification avancée : Guido est un 7 μ à aile 6 de sous-type social ("Sacrifice").

Dora (Nicoletta Braschi) : 6

Dora oscille entre les côtés phobique et contre-phobique du 6. À certains moments, avec sa mère, avec Rodolfo son fiancé ou avec Guido, elle est étrangement calme, soumise et passive. À d’autres, elle n’hésite pas à s’opposer aux gens. Par exemple, elle refuse d’accompagner Rodolfo à un dîner chez le préfet et pour bien ponctuer sa position, elle lui donne un grand coup de pied dans les jambes en public, ce qui, ramené dans le contexte des relations hommes-femmes de l’époque, est un acte fort d’opposition.

Elle manifeste plusieurs fois cette capacité à entrer en rébellion contre l’ordre social. Quand Guido l’emmène en voiture à la sortie de l’opéra, elle le suit et passe la soirée avec lui alors que son fiancé et le préfet l’attendent. Lors de son repas de fiançailles, quand elle s’aperçoit de la présence de Guido, elle se glisse sous la table pour le rejoindre et lui déclarer : "S’il te plaît, enlève-moi."

Bien entendu, c’est quand elle décide de suivre Guido et leur fils au camp de concentration qu’elle manifeste à plein cette capacité du 6 à se rebeller avec témérité contre une autorité excessive et à se montrer loyal et dévoué jusqu’au sacrifice pour les êtres aimés :

  Officier : Où voyez-vous une erreur ? Il n’y a pas d’erreur.
  Dora : Moi aussi alors, je veux prendre ce train.
  Officier : Je vous conseille de rentrer chez vous. Au revoir.
  Dora : Je veux monter dans ce train. Faites-moi tout de suite monter dans ce train.

Quand Dora veut reprocher quelque chose à quelqu’un, elle le fait au nom des règles : "Tu ne vois pas qu’il pleut des cordes. Tu pourrais être galant et approcher la voiture." ou "Tu aurais pu venir me chercher avec le parapluie. Voilà ce que c’est quand on n’a pas d’éducation. Ah non, regarde dans quel état je suis." Dans le même temps, Dora n’est pas très exigeante : "Pour me rendre heureuse, il suffit de très très peu de choses."

Mentale, Dora apprécie l’humour de Guido et en montre elle-même en fait preuve :

  Dora : Vous conduisez depuis quand ?
  Guido : Moi ? Depuis dix minutes.
  Dora : Ah, j’aurais dit moins que ça.

Identification avancée : Dora est un 6 de sous-type social ("Devoir").

Autres

D’autres personnages peuvent être étudiés à l’aide de l’Ennéagramme :

Giosuè (joué par Giorgio Cantarini), le fils de Guido et Dora est, un bien mignon petit 1. Il est sérieux, questionneur, obéissant (sauf pour aller se laver) et assertif.

Le Docteur Lessing (joué par Horst Buchholz) est un 5 μ entièrement désintégré. Son seul intérêt dans la vie est une activité mentale : résoudre des énigmes. Qu’il ait une difficulté, et il perd le désir de boire et de manger.

Lessing réprime totalement le centre émotionnel. Il y a, à ce propos, une scène difficilement soutenable dans le camp de concentration. Lessing s’approche de Guido et lui dit : "Il faut que je vous parle. C’est de la plus haute importance." Guido, et le spectateur avec lui, se prend alors à espérer. Mais Lessing est tout simplement en train de connaître des difficultés pour trouver la solution d’une énigme que lui a envoyée un ami autrichien. La manière dont il demande à Guido de la résoudre pour lui est d’une indécence absolue : "Aide-moi Guido. Pour l’amour du ciel, viens à mon secours. J’ai perdu mon sommeil."

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description du film